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T'aimer poème

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Message  Silence écrit Lun 6 Fév 2017 - 22:31

Si je n’ai plus demain pour t’aimer que ma voix,
Que de mes bras taris la caresse est éteinte,
Que négligeant ton sein, oublieux dans l’étreinte,
Je fais de mon esprit ton seul espoir de joie,

Ne m’en tiens pas rigueur, délaissée malgré moi
Mais sans cesse adorée dans l’extase et la plainte,
Triomphante splendeur, déesse ou bien défunte
Par mes chants honorée donc insoumise aux lois,

Pour un peu d’éternel ton corps peut bien s’omettre.
Grâce au verbe essentiel que j’ai choisi pour maître,
Qui dans ton regard naît comme un monde inconnu,

Je cèderai toujours aux tentations ineptes
Et si, chanceux détour, ton avenir m’accepte,
Verserai des sonnets sans honte à tes pieds nus.
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Message  Marine Lun 6 Fév 2017 - 22:54

La contradiction fondamentale de la relation amoureuse et de la poésie (* cf fin de mon commentaire) : la femme de langage que l'on fabrique délaisse et fait du tort à la femme réelle ; le premier "que" exceptif marque l'exclusion de l'amour réel au profit de l'amour chanté et de la poésie. Par un très beau glissement et comme une homonymie syntaxique, dirait un grammairien, le "que" exceptif devient ensuite, insensiblement, au vers 2 et 3, un "que" vicariant de la conjonction de subordination "si", qui lui donne sa nouvelle nature. Le terme "seul" revient cependant vers l'exceptif et l'exclusif. J'aime beaucoup la première strophe ; j'ai du toutefois la relire plusieurs fois pour la comprendre : est-ce à cause du participe présent, du fait d'une ambiguité du nom auquel se rapporte l'attribut "oublieux" (est-ce le "je", est-ce le "sein", est-ce que ce sont les deux ?). La première strophe rappelle aussi Louise Labé : "Si je n’ai plus demain pour t’aimer que ma voix" -> "Et qu'aux sanglots et soupirs résister
Pourra ma voix, et un peu faire entendre." Or, chez Labé, la poésie permet justement de lutter contre la mort ; ici, elle se révèle dans son risque : la causer, l'entraîner. "Je fais de mon esprit ton seul espoir de joie" : peut-être un peu alambiqué, je trouve que la construction de la phrase gâche un peu la belle simplicité d'un vers tel que "que de mes bras taris la caresse est éteinte".
Je suggère un point après "Ne m'en tiens pas rigueur." (ou un point-virgule ; le lecteur a besoin d'une petite pause je trouve, pour savourer ce très beau début.) En effet, "délaissée" pourrait faire croire qu'il désigne le poète (au féminin) : la construction est similaire à "oublieux dans l'étreinte", donc on croit que le participe passé désigne encore une fois le sujet, alors qu'il désigne l'objet, on s'y perd un peu ; cela pourrait être cependant un effet voulu de construction, je reste prudent tout en notant ici une difficulté de lecture. Globalement, la deuxième strophe, beaucoup moins originale selon moi dans sa reprise de la séculaire tradition prétarquisante, me plaît moins. (extase et plainte, cérémonie et élégie, déesse et défunte, le chant, les lois, tout ça sonne pour moi un peu "prof de français" - ce n'est pas une critique négative, bien sûr, mais un goût personnel ; je trouve que votre personnalité poétique mériterait, comme dans la première strophe, à abandonner l'explicite de ces héritages ; elle est forte, et on veut l'entendre.
"Pour un peu d’éternel ton corps peut bien s’omettre." : magnifique. J'enlèverais presque les vers 10 et 11 pour former trois quatrains, plus efficaces peut-être, malgré la tentation de garder la forme du sonnet, à laquelle, je le reconnais, "l'esprit" de ce poème, lui, convient parfaitement. Mais je songe à l'efficacité d'un :
"Pour un peu d’éternel ton corps peut bien s’omettre.
Je cèderai toujours aux tentations ineptes
Et si, chanceux détour, ton avenir m’accepte,
Verserai des sonnets sans honte à tes pieds nus."
Pourquoi ? Pour la parataxe. Vous produiriez alors une juxtaposition brutale de la contradiction (ton corps peut bien s'omettre / malgré tout je céderai toujours à la tentation... à la fois de la poésie... et on parle de tentation, donc quand même celle de ton corps...)
Vous l'aurez compris : j'ai beaucoup aimé. Merci pour ce travail et pour ce partage. Mon message est un peu rapide et approximatif, je n'ai pas beaucoup de temps, j'y reviendrai peut-être.

*La contradiction, donc : les mots ne peuvent pourtant s'écrire que si cette femme réelle existe ("et si chanceux détour ton avenir m'accepte / verserai des sonnets"). J'aime cette contradiction.
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Message  So-Back Mar 7 Fév 2017 - 10:09

je crois que "Aimer" trouve toujours une solution, et c'est ce qui en fais sa force, sa détermination, son enthousiasme , et parfois absurde

" quand mon cœur serait moins inepte à l'amour"
Rousseau


"Triomphante splendeur, déesse ou bien défunte"
ou les deux

poème joliment maitrisé


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Message  Annie Mar 7 Fév 2017 - 12:30

Curieux poème !
Formellement impeccable.
Quant au contenu, je ne peux le considérer que comme une tentative paradoxale, dénué de tout implication personnelle.
Pourquoi pas ?

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Message  Silence écrit Mer 8 Fév 2017 - 17:20

@Marine
S'il s'agit là d'un message "un peu rapide et approximatif", je tremble de ce que tu pourrais commettre en six heures de dissertation ! Merci beaucoup pour ton passage et pour ta très fine analyse, c'est un plaisir d'être commenté et aiguillé de cette manière. Pour te répondre en quelques mots :
- D'accord avec toi pour la faiblesse de "je fais de mon esprit ton seul espoir de joie". J'ai beaucoup sué pour écrire ce vers, et n'ai pas réussi à en faire quelque chose de satisfaisant. Je me suis efforcé de garder les rimes internes du poème, à chaque hémistiche (j'aime me fixer ce genre de contrainte absolument inutile mais qui charme l'oreille), et ça n'a pas loupé : échec au v.4. Je vais laisser passer quelques semaines avant d'y revenir, qui sait...
- Entièrement d'accord pour le point après "Ne m'en tiens pas rigueur". Je l'avais d'ailleurs mis dans une version de travail, que j'ai mal transcrite.
- D'accord aussi sur la faiblesse de la seconde strophe même si j'aime bien justement son côté un peu désuet. Après tout, dans un sonnet, je propose rarement des figures flamboyantes de modernité... Pareil : laissons couler quelques semaines. J'y reviendrai sans doute.

@So-Back
Merci pour ta lecture et ton commentaire.

@Annie
Tu as tout à fait raison, ici j'ai largement privilégié la forme (et les sonorités, avec les rimes centrales et finales) au fond. Rien de très personnel dans ces vers, juste un texte écrit pour me faire plaisir. J'aime alterner les deux.
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