aller (2 et 3)

(2)


demain
la peur lèchera la route
comme un animal devant le marcheur
guerre de mouvement
guerre de tranchée
obsidionnale ou guerre éclair
toutes les formes sont à examiner

tu t’es éveillée au pied du mont des oliviers
il y a une sueur sèche sur les herbes
il y avait des cris pendant ton rêve.

tu marches sous le soleil habituel du matin, tu as perdu ton auto
suffit-il de marcher seule, le dos droit
pour traverser la guerre ?
ou faut-il lui baiser la bouche
longuement
mâcher son haleine et vomir ?

où est celui d’hier soir
son visage renversé ?




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(3)


en fait, on attend, on est patient.
dans ces grands bâtiments ouverts, au milieu des autres
– sur des chaises en plastique,
couleur neutres,
tout est propre, gris et blanc
on appelle votre nom.
– jamais je n’ai autant entendu mon nom –
c’est la manière d’aller, dans ce pays-là
de faire la guerre contre personne, contre rien.
on est calme, on lit « Le seigneur des Anneaux »
assis, attendant.
on fait tout comme il faut,
tout ce qu’on vous dit,
on parle un peu on réfléchit
on rentre chez soi
on est bien traité,
on est souriant.

c’est pourquoi il faut lire une histoire de longues marches en pays hostile, de forêts inconnues. les éboulis et les dangers les bancs de brume autour du fleuve quand tombe la nuit,
les créatures fabuleuses
la peur la cruauté et l’union
la loyauté la douleur la faim
le repos et la mission – chevelures longues
qui flottent dans le vent glacé, les muscles, les armes et la magie.
ce qui reste à faire, le chemin vers le bord de l’enfer, la mort presque assurée, le mal.
c’est pourquoi cette lecture est si nécessaire, et rend heureux.

Comme j'arrive tard, j'ai lu les numéros 2 et 3 avant de me prononcer.

J'avoue que je suis déconcertée, le 1 ???
le 2, lire "marcheur - marcher" suffit à me faire sortir des boutons, comme on disait quand j'étais lycéenne.
le 3, peut-être une allusion au calvaire des réfigiées, mais il ya trop de sous-entendus obscurs pour que j'adhère.

Ma fille a essayé - il y a longtemps - de me faire lire le seigneur des anneaux, mais je ne "marche" pas, l'histoire des hommes est tellement plus passionnante.

Désolée, seyne, à plus !

Bielsa, tout près de la frontière
et j'ai souci des morts
qui n'iront pas au cimetière.

Je suis tout à fait d'accord avec toi Annie et j'ai un peu honte d'avoir posté ici cette suite. En fait, il s'agissait d'une tentative : traduire sous forme poétique une épreuve qu'on traverse. Il m'a semblé que dans cette traversée, ou aventure, on fait appel à des ressources qui sont du registre de la guerre et du voyage. Guerre et voyage intérieurs, bien sûr.
Le problème c'est que l'ensemble n'est pas du tout élaboré, en tout cas pas au point où un lecteur puisse y sentir quelque chose qui lui ressemble, et que les trois textes à la suite font plus penser à un jeu de piste dont la pluie aurait effacé la moitié des indices, ou à une série de "private jokes".

"Le Seigneur des Anneaux", je l'ai lu trois fois. Deux fois au cours d'épreuves, justement, que l'imaginaire de ce récit m'a aidée à vivre, la troisième à ma fille de 9 ans, qui pouvait être passionnée par l'histoire dans tous ses méandres, mais n'était pas encore capable de lire ce texte relativement complexe.
Il y aurait beaucoup à dire sur ce livre (dont je saute les trop longs récits de bataille, je l'avoue), livre pour moi métaphysique, et dont m'émeut beaucoup le lent trajet de Frodon et Sam Sagace. Mais je ne suis pas surprise qu'il t'ait rebutée, je l'avoue :-)

Pas de honte seyne, pas de honte
des fois on réussit moins bien que d'autres

Bielsa, tu as regardé ?

Je viens de regarder sur Wikipedia. C'est un beau récit de "hauts faits", dans cette terrible tuerie qu'a été la guerre d'Espagne. Qu'est-ce qui t'a fait relier ce nom à mon poème (ou au Seigneur des Anneaux) ?

Qu'est-ce qui t'a fait relier ce nom à mon poème

c'est toi qui l'a dit (comme on disait quand j'étais écolière:-)

traduire sous forme poétique une épreuve qu'on traverse. Il m'a semblé que dans cette traversée, ou aventure, on fait appel à des ressources qui sont du registre de la guerre et du voyage.

pas métaphorique, pas besoin

j'avoue avoir, de l'épisode de la poche de Bielsa, et de la retraite des habitants du village  - pas seulement les troupes engagées, tous les villageois - un ressenti plus violent que le récit bien aseptisé qu'en donne wikipedia
(il y a d'autres documents)
tu vas me redire (cf Paterson) qu'il n'y a pas lieu de jouer avec des références érudites, mais je ne joue pas avec l'histoire des hommes, je suis habitée.
Et souvent je me sens encore bien trop pauvre, trop ignorante.