Lilas

Tu t'appelais Lilas
chaque automne tu revenais
comme les feuilles jaunies des platanes
de la cour de l'école.
Tu n étais pas jolie non, mais
tu me fascinais
Assise sur les marches en grès
tu dessinais dans le creux de ta main gauche
une feuille de platane ou d'érable
pas avec un crayon,
pas avec un pinceau
Non, avec une aiguille et du fil jaune.
Tu t appelais Lilas
et tu venais chaque automne
dans la cour de mon école.
Tu cousais des feuilles de peau
dans la paume
de ta main gauche
chaque aiguillée soulevait un bout de ta peau
tu riais Lilas.
Quand la cloche de fin de récréation sonnait
tu avais cousu point par point
une feuille jaune dans ta main
Un bout de fil pendait toujours sur ton poignet
j'imaginais le chatouillis
la caresse de la soie.
Un matin
tu m'as dit que ton père était mort
car il portait une étoile jaune
sur son manteau.
Tu voulais mourir aussi
... pour savoir.
Quoi ?
Que les lilas peut-être
n'auront plus
de saison pour fleurir.

un bel hommage pour des souvenirs douloureux


Tu voulais mourir aussi
... pour savoir.
Quoi ?
Que les lilas peut-être
n'auront plus
de saison pour fleurir


au fil des saisons la vie se régénère ainsi que les corps , l'esprit , lui, reste vigilant , l'âme meurtrie pardonne

bravo

un beau poème, riche de sa simplicité. une évocation d'autant plus intense qu'elle procède de façon pudique avec cette étrange manière de tatouage sacrificiel au coeur de la main. beaucoup aimé ;

Ça tape juste, mais pas trop fort, juste comme il faut
Ça appuie où on a tous mal, -mais on le dit pas pareil-
Toujours cette pudeur que j'apprécie dans ta poésie, sobre et intense.

Et puis tu reviens par ici!

Merci pour vos lectures et pour ces commentaires là, qui me touchent, oui !
Je suis heureuse de vous retrouver, Polixène, Hellion, So-Back

Ben zut, il est passé où mon comm ? Ca ne s'arrange pas....!
Je te disais donc : je comprends qu'on puisse être fascinée par une brodeuse aussi étonnante, elle brode sa peau au fil jaune, elle brode sur l'histoire de son père, elle brode sa vie, elle se fait une vie avec des jeux autour de la mort, mais elle brode des feuilles, pas une étoile jaune...
Une inspiration très singulière, un ton sans emphase, une simplicité qui va bien au sujet, j'aime !

J'ai des problèmes avec le devoir de mémoire…vaut-il mieux oublier ? Et l'obligation de résilience, on en fait quoi ? Salut Croisic. Je ne critique pas comme tu vois, je m'intérroge…

Un texte limpide et fluide ; il y a ce ton mélancolique tout le long, puis on ne s'attend pas à cette triste fin. Une idée assez originale que de coudre des feuilles de peau dans la main, c'est étrange, presque dérangeant.