La chute

La Seine paressait
Au cœur des mortes eaux
Un vieux saule pleurait
Près du pont Mirabeau

Les péniches alourdies
Comme des fruits trop mûrs
Traînaient dans leur sillage
Des panaches de mouettes

Sur les toits de Paris
Comme des cierges fiers
Les cheminées fumaient
Et parlaient aux nuages

Assis au bord de l’eau
L’œil scrutant le bouchon
Des pêcheurs nonchalants
Taquinaient le goujon

Et soudain je vous vis
Debout dans le soleil
Comme une flamme vive
Dans un ciel éternel

Toute de blanc vêtue
Les cheveux en voyage
Telle une vierge rare
A la proue d’un vaisseau

Dans un froissement d’ailes
Votre corps s’envola
Plongeant dans l’onde verte
Silencieux cormoran

Dans le linceul liquide
Comme une algue ondulante
Vous sembliez endormie
Nénuphar dérivant

Wow... j'ai l'expression coup de maître en bouche.

À chaque strophe une image, elles s'enchaînent, c'est maitrisé et fort.

Je n’ai aucune préférence, elles forment un tout, un ensemble immuable.

Bravo.

Bunje.

Oui, c'est vraiment beau. Pour une fois le rythme en hexasyllabes ne me gêne pas, même si je pense que le poème aurait pu être plus fort sur un rythme plus ondoyant.
La première strophe donne trop dans le faux Apollinaire à mon goût.

Oh ! j'ai aimé ceci !!
Belle description d'un moment de Paris.
Elégante simplicité.
De très belles choses comme :

Sur les toits de Paris
Comme des cierges fiers
Les cheminées fumaient
Et parlaient aux nuages

Et puis cette apparition comme un éclair... Ce qui suit, avec ce mouvement comme un essor et la retombée très visuelle, "ophélienne"...

J'ai beaucoup aimé ce poème: les premières strophes décrivant de manière riche un paysage assez banal, couronnées par les derniers vers où l'ambiance est plus intriguante...

Ma préférence va au début, avec la reprise d'Apollinaire:

La Seine paressait
Au cœur des mortes eaux
Un vieux saule pleurait
Près du pont Mirabeau

Et j'aime aussi beaucoup cette image:

Les cheminées fumaient
Et parlaient aux nuages

J'ai trouvé à ce poème une facilité de lecture que je n'avais pas trouvé dans tes précédents poèmes: je trouve celui-là beaucoup plus simple, plus limpide... Merci pour ces quelques instants agréables de lecture!

Dans la première strophe, les rimes me gênent un peu, elles sautent trop aux yeux et cet aspect est notamment mis en avant par le fait que, dans la suite, il n'y a pas ce respect à tout prix de la rime (ce que je préfère d'ailleurs).

J'aime les images que tu photographies mais en même temps, j'ai le sentiment qu'il y a deux parties dans ce poème, une certaine description parisienne, puis une rencontre fugitive, et les deux ne se marient pas de manière très harmonieuse en ce qui me concerne, mais cela est bien entendu subjectif.