Dans le jardin mutin

Dans le jardin mutin

Il était un jardin, tout fleuri d’impatience
Un jardin, souviens-toi, où se fanait l’enfance.
Nous étions en l’année…Mon Dieu, je ne sais plus !
Mon air un peu ballot ne t’avait pas déplu.

Un soir du mois de juin que tes bras s'offraient nus,
Non loin de la rivière où nous étions venus,
Je capturai ta main comme une truite vive,
En priant en secret que ton règne m’arrive.

Tu m’as dit: « pas encore », habillée de candeur,
Quand ma bouche goulue taquina ta pudeur
En cherchant le chemin de ton sein si joli.

Le jardin a pâli sous l’assaut des hivers.
Il n’est plus d’iris d’eau sur les berges d’hier.
Mais du goût de ton sein ne suis pas aboli.

Hélas Hellian, postant en cette heure tardive, vous ne pouviez tomber que sur le lecteur de garde -moi- qui est au surplus incapable de vous aider ou vous conseiller en quoi que ce soit !
Toutefois, je n'écrirais pas si je n'avais que cela à vous dire...
Le poème, pour le lecteur sensible que je suis, fonctionne plus que bien :
J'y retrouve, à mon avis, ce que tous y retrouvent, grâce à vous, l'infini réconfort d'un souvenir qui résiste à la tristesse et à l'amertume de vivre.
Le plus étonnant, dans votre poème, c'est qu'avec peu de modifications, il s'adresserait parfaitement à moi :
Il suffirait juste de remplacer "ballot par falot" et "aboli" par "affranchi"...

Dans la nuit torride, avant que la canicule engloutisse la dernière pensée, je suis passée par ce "jardin". Peu de temps, de crainte de déranger les fantômes.
Mais pourquoi " aboli " ?

Ba a écrit:
Mais pourquoi " aboli " ?

être aboli = être soustrait à, délivré de, libèré de, être sans
La mémoire est abolie du souvenir de...
Cela poserait-il problème ici ?

Bonjour Hellian,

j'ai beaucoup apprécié votre votre poème, vraiment beaucoup.
Néanmoins je me dis qu'avec ses deux ou trois chevilles en moins je l'aurais encore plus apprécié.

Le tout fleuri du début pourrait peut-être se faire remplacer (tout en fournissant un mot d'excuse ou d'absence ;-)) par un synonyme de fleuri par exemple.

Nous étions en l’année…Mon Dieu, je ne sais plus !

Ici, le vers me plaît moyennement, le Mon Dieu, je ne sais plus ! me semble un peu forcé.

En cherchant le chemin de ton sein si joli.

Idem que la première remarque, le si pourrait éventuellement être remplacé (bon vous me direz que si tous vos mots se barrent, que va-t-il rester de votre poème ;-))

Mais du goût de ton sein ne suis pas aboli.

Et pour conclure, j'aurais préféré un synonyme du mot sein voire une allégorie plutôt que la répétition.

En dehors de ces quelques points, bravo Hellian, très joli poème.

Un poème très classique, maîtrisé, un peu languissant à mon goût... Comme Peter Pan, j'ai cru y sentir la présence de chevilles, comme s'il y existait des mots non amenés là par une espèce de nécessité interne et que je ressens donc comme superflus. Je trouve cela dommage malgré la belle facture de l'ensemble.

Pas de problème, juste le terme qui me semblait relever davantage du lexique du droit : esclavage aboli par exemple.
Il en des mots comme de certaines personnes : une fois étiquetés ils ne se débarrassent plus du " sparadrap " premier.

pour mon goût très personnel .... bien trop classique....
il manque ce petit grain de folie, cet espace d'imaginaire, cette amplitude respiratoire, qui m'emporteraient dans la douceur tendre de cette instantané printanier....
le rythme maîtrisé de ce poème, scande la lassitude à mon oreille, plus que la magie ..... désolée
pourtant le fond me parle.....

Beaucoup aimé cette fraîcheur et ces regrets, bien maîtrisés à mes yeux, avec élégance. Il se dégage de tout ceci une mélancolie un peu triste qui donne du charme au poème.

J'ai entre autres particulièrement apprécié En priant en secret que ton règne m’arrive.

Juste un léger bémol sur ton sein si joli dont les sonorités sont répétées par de ton sein ne suis pas aboli. Est-ce la répétition de sein ou bien la rime trop visible, je ne sais.

Je trouve cet poème, cette mutinerie, comment dirais-je... reposante. Et en ce sens, elle me plaît. Pour sa simplicité, mais aussi pour la tendresse qui s'en dégage, pour l'ardeur que met le narrateur à décrire sa naïveté et à déclarer sa flamme encore, après tout ce temps.
La "truite vive" sans me paraître incongrue me fait sursauter ; en revanche la répétition de "sein" me semble bien traduire la perpétuité du désir, d'hier à aujourd'hui.
J'aime particulièrement la première strophe, son ton mélancolique et le très auditif "Mon Dieu, je ne sais plus" de ce "ballot" toujours amoureux malgré les années qui ont passé.

J'ai bien ri. Ainsi vous êtes un poète comique ?

Un thème très classique et poétique à souhait.
Très bien traité avec beaucoup de retenue et de pudeur. Un vrai sens de la poésie.
C'est bien balancé, avec de très belles choses et quelques petites faiblesses dans le choix de certaines formules : "mon air un peu ballot..." "Mais du goût de ton sein..."
Des formules qu'il serait facile de remplacer : "mes mots mal assurés" ? "Ton souvenir en vain..." ?
Il y a moyen de changer ça pour que ce soit parfait.

mes amis,

Voyez comme la subjectivité fait recette avec un poème celui-ci :

Des formules qui réjouissent les uns inspirent une grimace aux autres.

On évoque des « chevilles » à propos d'un vers que l'on trouve par ailleurs « très auditif ».

Enfin, d'aucuns voient ici un poème mélancolique quand d'autres confient avoir «beaucoup ri» (?).

C'est toujours un plaisir que d'avoir écrit un texte qui suscite des réactions si diverses. C'est également courir le risque de s'expose à la vanité de croire que ce texte est riche.

Je veux juste ici vous livrer mon intention initiale :
je souhaitais faire un sonnt - mignardise, s'inscrivant dans une tradition légèrement libertine, à mi-chemin entre mélancolie et humour.

Aussi, je tiens à ces petites imperfections :« ballot "... " Mon Dieu, je ne sais plus» (Petit clin d'oeil à « la mémoire qui flanche » et non pas « cheville »)... «En priant que ton règne m'arrive» (référenceà la forme ancienne de la prière que vous savez).

Et je tiens tout autant à la répétition du mot « sein "dans le dernier vers, comme signe de la persistance du souvenir et de la focalisation un peu obsessionnelle du désir... 30 ans après...

Vous l'aurez compris, j'aime pas tellement quand c'est trop léché. La recherche de l'élégance, si tant est, s'accommode très bien d'un soupçon de négligé.

Voilà, voilà.

Cela n'est pas une justification, chère Socque, simplement un petit manifeste...

une hellianade comme on les aime
comme ces cerises que l'on croque perché dans les frondaisons

Bien aimé, hormis quelques expressions un peu trop précieuses à mon goût.

J'adore cette image :
"Je capturai ta main comme une truite vive"

un sonnet classique, mais j'ai plutôt aimé ce jardin mutin.

Je ne viens pas souvent, Cher Héllian, aussi , je fus bien aise de mener mes pas dans ce charmant jardin mélancolique. Une sorte de mignardise ou gourmandiseà laquelle on ne résiste pas.


Ne vivre que de souvenirs...On n'en croit rien!

J'ai un petit rien du tout à regretter et , là, je rejoins certains, c'est ce mot "aboli" que je trouve lourd, inapproprié. j'aurais aimé une note ultra suave, même coquin pour le dernier mot.

Bien à vous, mon Cher et merci pour le plaisir que vous nous donnez!