Le compagnon de bureau
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Le compagnon de bureau
Cela fait des jours qu'il est dans cette position, à la limite entre la danse classique et le saut de joie. Il regarde par la fenêtre.
Qu'importe qu'il fasse nuit ou jour, que les stores soient baissés ou les volets fermés, il fixe toujours le même point au loin, avec une intensité et une impassibilité de macchabée. Je n'ose pas le déplacer, alors j'essaie de tracer dans l'espace un trait qui m'amènerait à ce miracle qui capte tout son intérêt.
Serait-ce cette bâche bleue sur les fagots empilés, qui ne cesse de bouger même quand il n'y a pas de vent ? Ou bien peut être suit-il avec attention la vie de cette haie, dont les pousses ont été intoxiquées par la fumée sortant des pots d'échappement. Les machines de chantier stationnaient là il y a encore un peu moins d'un mois, et il me semble que les feuilles qui ne sont pas tombées regagnent lentement leur couleur d'origine, mais ça n'est peut être qu'une impression.
J'avance mon visage et le tourne de droite à gauche, de gauche à droite; Ah, c'est tellement difficile ! Il est si petit, et ses yeux si mal définis, comment pourrais-je cerner son champ de vision ? Et s'il voyait comme une mouche, ou un chat ? Peut être sont-ce les contrastes qui le fascinent, s'il ne voit pas les couleurs.
Je rejette un regard dehors, mais aucune cheminée ne fume, le ciel est gris, pour moi comme pour lui, et rien ne bouge; sauf la bâche. Lui non plus il ne bouge pas, j'ai beau l'observer sous tous les angles possibles, il reste immobile. Pire, je me rends compte que sous chaque couture, la direction dans laquelle il regarde semble différente. Mon dieu, que cela est frustrant.
Je pense qu'il vaut encore mieux que je me remette à réviser, plutôt que de continuer à divaguer sur mon mannequin en bois.
Qu'importe qu'il fasse nuit ou jour, que les stores soient baissés ou les volets fermés, il fixe toujours le même point au loin, avec une intensité et une impassibilité de macchabée. Je n'ose pas le déplacer, alors j'essaie de tracer dans l'espace un trait qui m'amènerait à ce miracle qui capte tout son intérêt.
Serait-ce cette bâche bleue sur les fagots empilés, qui ne cesse de bouger même quand il n'y a pas de vent ? Ou bien peut être suit-il avec attention la vie de cette haie, dont les pousses ont été intoxiquées par la fumée sortant des pots d'échappement. Les machines de chantier stationnaient là il y a encore un peu moins d'un mois, et il me semble que les feuilles qui ne sont pas tombées regagnent lentement leur couleur d'origine, mais ça n'est peut être qu'une impression.
J'avance mon visage et le tourne de droite à gauche, de gauche à droite; Ah, c'est tellement difficile ! Il est si petit, et ses yeux si mal définis, comment pourrais-je cerner son champ de vision ? Et s'il voyait comme une mouche, ou un chat ? Peut être sont-ce les contrastes qui le fascinent, s'il ne voit pas les couleurs.
Je rejette un regard dehors, mais aucune cheminée ne fume, le ciel est gris, pour moi comme pour lui, et rien ne bouge; sauf la bâche. Lui non plus il ne bouge pas, j'ai beau l'observer sous tous les angles possibles, il reste immobile. Pire, je me rends compte que sous chaque couture, la direction dans laquelle il regarde semble différente. Mon dieu, que cela est frustrant.
Je pense qu'il vaut encore mieux que je me remette à réviser, plutôt que de continuer à divaguer sur mon mannequin en bois.
jaon doe- Nombre de messages : 169
Age : 113
Localisation : Pseudonyme de publication commun, à la disposition de tous ceux qui veulent. Pour obtenir son mot de passe, vous pouvez envoyer un mail à Procuste à partir de son profil.
Date d'inscription : 05/02/2010
Re: Le compagnon de bureau
Pas mal du tout ! Joli flash, je trouve, simple et effectivement intrigant.
Une remarque :
« j'essaie de tracer dans l'espace un trait qui m'amènerait à ce miracle qui capte tout son intérêt. » : la construction, avec deux relatives imbriquées introduites par « qui », me paraît lourde
Une remarque :
« j'essaie de tracer dans l'espace un trait qui m'amènerait à ce miracle qui capte tout son intérêt. » : la construction, avec deux relatives imbriquées introduites par « qui », me paraît lourde
Invité- Invité
Le compagnon de bureau
Bonsoir,
Ce texte est un peu court. On le voit sur l'écran et on comprend immédiatement que le fin mot de l'histoire se trouve à la dernière ligne. Mais l'attente n'est pas longue ... pas suffisamment longue. En présence d'une simple description et libéré du souci d'avoir à analyser un enchaînement ou de suivre une progression, on s'appesantit sur les mots eux-mêmes et, malgré une orthographe parfaite et une écriture bien maîtrisée, on trébuche lorsqu'il y a des aspérités :
- les machines sont en général fixes, dans des ateliers ou des usines, vous voulez parler des engins de chantiers - expression consacrée - munis de pots d'échappement, parmi lesquels les bulldozers, les chargeurs, les niveleuses, les rouleaux compresseurs, les pelles hydrauliques, les dumpers ...
- il me semble que le verbe regagner est surtout utilisé dans sa seconde acception qui recèle une notion de lieu : les feuilles de la haie ne peuvent donc regagner leurs couleurs ... mais on regagne ses pénates, on regagne son domicile, on regagne sa chambre après en être sorti.
- enfin, bien que la construction du verbe rejeter puisse indiquer que l'on jette à nouveau, il me semble que l'on ne peut pas rejeter un regard dehors. Ce verbe exprime le refus et l'exclusion : on rejette une responsabilité, on rejette une idée, on rejette une proposition ...
Amicalement,
midnightrambler
Et que l'on ne me dise pas que les humains sont des engins de chantier !
Comprenne qui voudra, mais je voulais la faire avant que l'on ne me la fît !
Ce texte est un peu court. On le voit sur l'écran et on comprend immédiatement que le fin mot de l'histoire se trouve à la dernière ligne. Mais l'attente n'est pas longue ... pas suffisamment longue. En présence d'une simple description et libéré du souci d'avoir à analyser un enchaînement ou de suivre une progression, on s'appesantit sur les mots eux-mêmes et, malgré une orthographe parfaite et une écriture bien maîtrisée, on trébuche lorsqu'il y a des aspérités :
- les machines sont en général fixes, dans des ateliers ou des usines, vous voulez parler des engins de chantiers - expression consacrée - munis de pots d'échappement, parmi lesquels les bulldozers, les chargeurs, les niveleuses, les rouleaux compresseurs, les pelles hydrauliques, les dumpers ...
- il me semble que le verbe regagner est surtout utilisé dans sa seconde acception qui recèle une notion de lieu : les feuilles de la haie ne peuvent donc regagner leurs couleurs ... mais on regagne ses pénates, on regagne son domicile, on regagne sa chambre après en être sorti.
- enfin, bien que la construction du verbe rejeter puisse indiquer que l'on jette à nouveau, il me semble que l'on ne peut pas rejeter un regard dehors. Ce verbe exprime le refus et l'exclusion : on rejette une responsabilité, on rejette une idée, on rejette une proposition ...
Amicalement,
midnightrambler
Et que l'on ne me dise pas que les humains sont des engins de chantier !
Comprenne qui voudra, mais je voulais la faire avant que l'on ne me la fît !
midnightrambler- Nombre de messages : 2606
Age : 71
Localisation : Alpes de Haute-Provence laclefdeschamps66@hotmail.fr
Date d'inscription : 10/01/2010
Re: Le compagnon de bureau
Il est très très chouette ce texte et sa brièveté n'empêche pas de faire passer toutes sortes d'interrogations, de possibilités... J'aime l'exercice qui consiste à partir de si peu et à broder, fabuler. Belle imagination.
Peut-être que la chute est un peu brutale et trop limpide par rapport à ce qui précède ; d'un autre côté, je ne vois pas vraiment comment tu aurais pu t'en sortir autrement..
Peut-être que la chute est un peu brutale et trop limpide par rapport à ce qui précède ; d'un autre côté, je ne vois pas vraiment comment tu aurais pu t'en sortir autrement..
Invité- Invité
Re: Le compagnon de bureau
ah je me doutais depuis le départ d'un texte à chute
mais celle-ci est bien amenée car c'est intrigant jusqu'à la fin
(j'avais pensé à un squelette en plastique comme dans les facs)
c'est agréablement écrit
mais celle-ci est bien amenée car c'est intrigant jusqu'à la fin
(j'avais pensé à un squelette en plastique comme dans les facs)
c'est agréablement écrit
Re: Le compagnon de bureau
Bref, évocateur, le trait est juste, le ton plaisant, le tout bien emballé : c'est cadeau.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: Le compagnon de bureau
Cela fait des jours qu'il est dans cette position, à la limite entre la danse classique et le saut de joie. Il regarde par la fenêtre.
Oh oui !
C'est une petite chute finalement. Tout au long du texte je me prépare au grand saut, et finalement je ne saute qu'une marche et je me demande pourquoi cette corde, à quoi sert tout cet équipement à coté de moi.
Oh oui !
C'est une petite chute finalement. Tout au long du texte je me prépare au grand saut, et finalement je ne saute qu'une marche et je me demande pourquoi cette corde, à quoi sert tout cet équipement à coté de moi.
Nechez- Nombre de messages : 318
Age : 35
Date d'inscription : 19/12/2007
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