TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
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TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
La foule du dimanche matin mêle ses visages enjoués, somnolents ou simplement en quête de légumes à bon prix. Sur la place, c’est tout un déballage de tissus qui ondoie au vent. Impression douce mais un peu fade pour un printemps. Mon cabas se prend dans une robe. J’évite le drame, glisse un sourire au vendeur puis je pousse vers les bouquinistes et le violon qui crincrine là-bas.
- Inès !
Cette voix qui émerge du brouhaha me tire loin, si loin en arrière.
- Inès ! Tu es revenue ?
- Comme tu vois…
Je regrette déjà ma froideur maladroite. Mais il passe sur cela et m’entoure d’un regard clair :
- Je suis content de te voir ! Tu as bien le temps de prendre quelque chose ?
- J’allais y aller, mais j’ai un instant.
Nous descendons vers la plage et ses bars anonymes. Je cherche quelque chose à dire mais la mémoire me barre la bouche. Et l’on voit si bien la mer que nous restons un temps en silence. Je reprends la marche. Ne pas se faire d’autres souvenirs.
Il commande, scrute un point, au loin, avant de replonger ses yeux pleins de vie vers moi :
- Tout ce temps ! Tu aurais pu donner des nouvelles ! Quand es-tu rentrée ?
- Il y a quelques mois, déjà, mais j’ai un peu bougé depuis. Tu sais, le travail ne court pas les rues, ici. Toi ?
- La vie, les amis. J’ai peu de temps pour écrire, mais je ne lâche pas.
- Continue, c’est là que tu es.
- Parle-moi de toi. As-tu trouvé ce que tu cherchais ?
À mon tour, je regarde vers la mer, en quête d’inspiration.
Depuis longtemps, trop longtemps, je le devinais.
- Inès !
Cette voix qui émerge du brouhaha me tire loin, si loin en arrière.
- Inès ! Tu es revenue ?
- Comme tu vois…
Je regrette déjà ma froideur maladroite. Mais il passe sur cela et m’entoure d’un regard clair :
- Je suis content de te voir ! Tu as bien le temps de prendre quelque chose ?
- J’allais y aller, mais j’ai un instant.
Nous descendons vers la plage et ses bars anonymes. Je cherche quelque chose à dire mais la mémoire me barre la bouche. Et l’on voit si bien la mer que nous restons un temps en silence. Je reprends la marche. Ne pas se faire d’autres souvenirs.
Il commande, scrute un point, au loin, avant de replonger ses yeux pleins de vie vers moi :
- Tout ce temps ! Tu aurais pu donner des nouvelles ! Quand es-tu rentrée ?
- Il y a quelques mois, déjà, mais j’ai un peu bougé depuis. Tu sais, le travail ne court pas les rues, ici. Toi ?
- La vie, les amis. J’ai peu de temps pour écrire, mais je ne lâche pas.
- Continue, c’est là que tu es.
- Parle-moi de toi. As-tu trouvé ce que tu cherchais ?
À mon tour, je regarde vers la mer, en quête d’inspiration.
Depuis longtemps, trop longtemps, je le devinais.
Aire__Azul- Nombre de messages : 474
Age : 58
Localisation : TOULOUSE
Date d'inscription : 30/03/2010
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Un texte attachant, je trouve, et le format frustrant (car j'ai regretté de devoir si vite quitter les personnages) y est, je crois, pour quelque chose. Si je savais tout de la situation, j'ai l'impression que je serais déçue... comme un paysage plus beau sous la brume.
Deux remarques :
"Mais il passe sur cela et m’entoure d’un regard clair" : "entourer d'un regard", je trouve cela bizarre
"J’allais y aller" : ça se dit, c'est vrai, mais, vu écrit, ça coince un peu pour moi
Deux remarques :
"Mais il passe sur cela et m’entoure d’un regard clair" : "entourer d'un regard", je trouve cela bizarre
"J’allais y aller" : ça se dit, c'est vrai, mais, vu écrit, ça coince un peu pour moi
Invité- Invité
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Tout en finesse. Et en non-dits émouvants. J'aime beaucoup ta prose depuis ton arrivée ici, Aire_Azul.
Invité- Invité
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Un texte plein de finesse, que j'ai apprécié. J'aimerais lire un plus long format.
Invité- Invité
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
ça se lit bien, c'est fluide mais ça m'a laissé l'impression de lire le début d'une histoire. Il est vrai que le format 1500 est très limitant pour se permettre d'être un peu plus explicite. Ce qui fait que je n'ai pas saisi la fin !
demi-lune- Nombre de messages : 795
Age : 64
Localisation : Tarn
Date d'inscription : 07/11/2009
TEXTES 1500 - Saison 2 : On voyait si bien la mer
La foule du dimanche matin mêle ses visages enjoués, somnolents ou simplement en quête de légumes à bon prix. Sur la place, c’est tout un déballage de tissus qui ondoie au vent. Impression douce mais un peu fade pour un printemps. Mon cabas se prend dans une robe. J’évite le drame, glisse un sourire au vendeur puis je pousse vers les bouquinistes et le violon qui crincrine là-bas.
- Inès !
voix qui émerge du brouhaha me tire loin, loin en arrière.
- Inès ! Tu es revenue ?
- Comme tu vois…
Je regrette déjà ma froideur maladroite. Mais il passe sur cela et m’invite d’un regard clair :
- Je suis content de te voir ! Tu as bien le temps de prendre quelque chose ?
- J’allais rentrer, mais j’ai un instant.
Nous descendons vers la plage et ses bars anonymes. Je cherche quelque chose à dire mais la mémoire me barre la bouche. Et l’on voit si bien la mer que nous restons un temps en silence. Je reprends la marche. Ne pas se faire d’autres souvenirs.
Il commande, scrute un point, au loin, avant de replonger des yeux pleins de vie vers moi :
- Tout ce temps ! Tu aurais pu donner des nouvelles ! Quand es-tu rentrée ?
- Il y a quelque temps, déjà, mais j’ai un peu bougé depuis. Tu sais, le travail ne court pas les rues, ici. Toi ?
- La vie, les amis. J’ai peu de temps pour écrire, mais je ne lâche pas.
- Continue, c’est là que tu es.
- Parle-moi de toi. As-tu trouvé ce que tu cherchais ?
À mon tour, je regarde vers la mer, en quête d’inspiration.
Il y avait trop longtemps que j’avais abandonné ma course.
- Inès !
voix qui émerge du brouhaha me tire loin, loin en arrière.
- Inès ! Tu es revenue ?
- Comme tu vois…
Je regrette déjà ma froideur maladroite. Mais il passe sur cela et m’invite d’un regard clair :
- Je suis content de te voir ! Tu as bien le temps de prendre quelque chose ?
- J’allais rentrer, mais j’ai un instant.
Nous descendons vers la plage et ses bars anonymes. Je cherche quelque chose à dire mais la mémoire me barre la bouche. Et l’on voit si bien la mer que nous restons un temps en silence. Je reprends la marche. Ne pas se faire d’autres souvenirs.
Il commande, scrute un point, au loin, avant de replonger des yeux pleins de vie vers moi :
- Tout ce temps ! Tu aurais pu donner des nouvelles ! Quand es-tu rentrée ?
- Il y a quelque temps, déjà, mais j’ai un peu bougé depuis. Tu sais, le travail ne court pas les rues, ici. Toi ?
- La vie, les amis. J’ai peu de temps pour écrire, mais je ne lâche pas.
- Continue, c’est là que tu es.
- Parle-moi de toi. As-tu trouvé ce que tu cherchais ?
À mon tour, je regarde vers la mer, en quête d’inspiration.
Il y avait trop longtemps que j’avais abandonné ma course.
Aire__Azul- Nombre de messages : 474
Age : 58
Localisation : TOULOUSE
Date d'inscription : 30/03/2010
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
" La mémoire qui barre la bouche " rien que pour ce silence. Et puis la deuxième version bien plus claire dans le " sombre ".
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Inès est de retour vers le lieu de son passé. Elle le vit pourtant au présent, et rien ni personne sur le marché où elle flâne ne la sort de cette présence, jusqu’à cette rencontre. C’est plus une rencontre avec son passé qu’une rencontre avec un homme. Cet homme, c’est d’abord une voix. Une parole qui émerge de l’océan des rumeurs indistinctes du présent, du brouhaha, du flot anonyme de la foule de ce dimanche matin au marché. C’est une voix qui l’interpelle, qui la nomme : C’est toi, Inès. Qui la sort de son immersion oublieuse de soi dans le présent, pour la ramener à elle-même, à son passé « loin en arrière », à son histoire.
Mais Inès n’a pas de voix pour le passé, la mémoire lui « barre la bouche ». Le passé est sans voix. Elle n’a pas les mots pour le dire. Elle ne peut que contempler le silence de la mer.
Lui parle, lui est la vie, lui écrit. C’est la parole, c’est la vie, c’est l’écriture qui l’appellent, mais Inès, elle, est enfermée dans le silence, dans une parenthèse de la vie. Elle ne peut parler d’elle-même, c'est-à-dire de son histoire ; elle ne peut l’écrire. Elle semble ne pas s’être encore trouvée, elle semble avoir renoncé à cette quête d’elle-même, dans l’oubli de soi et du passé, ce passé comme un grand blanc, ou comme le grand bleu de la mer : « Il y avait trop longtemps que j’avais abandonné ma course. ». Rappelée à elle-même, Inès ne peut que se taire.
Beau texte, Aire_Azul, qui, en peu de lignes, sait donner une véritable épaisseur psychologique, une profondeur, aux personnages du récit.
Mais Inès n’a pas de voix pour le passé, la mémoire lui « barre la bouche ». Le passé est sans voix. Elle n’a pas les mots pour le dire. Elle ne peut que contempler le silence de la mer.
Lui parle, lui est la vie, lui écrit. C’est la parole, c’est la vie, c’est l’écriture qui l’appellent, mais Inès, elle, est enfermée dans le silence, dans une parenthèse de la vie. Elle ne peut parler d’elle-même, c'est-à-dire de son histoire ; elle ne peut l’écrire. Elle semble ne pas s’être encore trouvée, elle semble avoir renoncé à cette quête d’elle-même, dans l’oubli de soi et du passé, ce passé comme un grand blanc, ou comme le grand bleu de la mer : « Il y avait trop longtemps que j’avais abandonné ma course. ». Rappelée à elle-même, Inès ne peut que se taire.
Beau texte, Aire_Azul, qui, en peu de lignes, sait donner une véritable épaisseur psychologique, une profondeur, aux personnages du récit.
Louis- Nombre de messages : 458
Age : 69
Date d'inscription : 28/10/2009
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Des personnages qui prennent vie et corps en quelques lignes, à tel point qu'on aimerait faire un bout de chemin supplémentaire avec eux. En même temps, ce format court te permet de jouer la carte du mystère, du non-dit et de l'émotion qui se tâte. Alors plus long ou si court... pas simple !
Il y a de ci de là des détails qui me plaisent et marquent la différence. Je pense par exemple à ou simplement en quête de légumes à bon prix.
Il y a de ci de là des détails qui me plaisent et marquent la différence. Je pense par exemple à ou simplement en quête de légumes à bon prix.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
J'aime beaucoup ce texte.
Belle réussite dans les premières lignes pour décrire le marché, avec une mention particulière pour "le déballage de tissus qui ondoie" qui donne toute sa légèreté à la scène de départ.
Je préfère la deuxième version pour la chute qui se montre bien plus suggestive et du coup intensifie le contraste.
A te lire Aire
Belle réussite dans les premières lignes pour décrire le marché, avec une mention particulière pour "le déballage de tissus qui ondoie" qui donne toute sa légèreté à la scène de départ.
Je préfère la deuxième version pour la chute qui se montre bien plus suggestive et du coup intensifie le contraste.
A te lire Aire
Roz-gingembre- Nombre de messages : 1044
Age : 62
Date d'inscription : 14/11/2008
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
J’ai lu directement le second. Une langueur plutôt séduisante et même si le format se prête assez mal aux non-dits, je dirais que c’est plutôt réussi, outre le fait que je ne comprends pas cette phrase « avant de replonger ses yeux pleins de vie vers moi » on replonge DANS quelques chose de clos : avant de replonger ses yeux pleins de vie dans les miens. Pas VERS, puisque vague.
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 60
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
... Sur la place, c’est tout un déballage de tissus qui ondoie au vent.... même si ce n'est pas grammaticalement correct, je trouve dommage que les tissus n'ondoient pas eux aussi.
Une belle rencontre avec ce texte.
Une belle rencontre avec ce texte.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Je me suis fait la réflexion à propos de "ondoie". Même si le singulier se rapportant à "déballage" est tout à fait juste ici. Sinon que je visualise des étoffes ondoyant différemment suivant leur matière alors que "déballage" fige un peu l'ensemble en un mouvement unique.
J'ai aimé ce texte, ce qu'il raconte. Ce passé à peine évoqué (même s'il pourrait l'être un tout petit peu plus) qui laisse au lecteur la possibilité de l'imaginer ou de s'y retrouver pour ceux qui ont vécu une situation semblable.
Ok aussi pour rectifier replonger "vers". Les yeux peuvent revenir vers ou plonger dans.
"la mémoire qui me barre la bouche" ... "ne pas se faire d'autres souvenirs"... "Il y avait trop longtemps que j’avais abandonné ma course" : j'aime ce que ces phrases renferment de "non-dits".
J'ai aimé ce texte, ce qu'il raconte. Ce passé à peine évoqué (même s'il pourrait l'être un tout petit peu plus) qui laisse au lecteur la possibilité de l'imaginer ou de s'y retrouver pour ceux qui ont vécu une situation semblable.
Ok aussi pour rectifier replonger "vers". Les yeux peuvent revenir vers ou plonger dans.
"la mémoire qui me barre la bouche" ... "ne pas se faire d'autres souvenirs"... "Il y avait trop longtemps que j’avais abandonné ma course" : j'aime ce que ces phrases renferment de "non-dits".
Reginelle- Nombre de messages : 1753
Age : 74
Localisation : au fil de l'eau
Date d'inscription : 07/03/2008
Re: TEXTES 1500 : Saison 2 - On voyait si bien la mer
Un joli texte, plein de douceur mélancolique. Le format permet de boucler l'histoire en laissant le lecteur plein de questions en suspens, ce qui est bien agréable.
Où sont passées les contraintes, en dehors du bord de mer ?
Où sont passées les contraintes, en dehors du bord de mer ?
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 67
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
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