TEXTES 1500 : Saison 2 - Des rires en rafales

Je n’aime pas les clichés bien que je sois photographe. Mais quitte à me prendre un râteau, je lui roulerais bien une pelle à cette so beautiful Lolita.
-Je peux vous tirer le portrait ?
-Tant que tu ne nous tires pas la gueule, me répond –elle, abrupte.
C’est vrai, je l’avoue, je souris rarement, et ris encore moins.
Elle se tourne vers sa copine.
-Pussycat ?
Poussah au féminin, Pussycat, poussive, s’affale puis s’affole sur sa serviette. Et toute aussi radicale :
-Monsieur est mateur et amateur de baleines échouées ?
Je ris jaune. A l’intérieur. Interloqué, je m’ensable. Le temps coule. Je m’enlise.
-En ce cas, tu permettras qu’on se cache à l’eau, ajoute Lolita narquoise.
Flash -back. C’est comme une révélation, je suis fixé. Je fais le point : pre ou post- coïtum, je suis beau oui, comme Bowie mais animal triste. Homo erectus à rictus. Qu’ai-je raté ? Je me sens flou et floué.
Elles me regardent complices, rient aux larmes.
Alors, je dépose les armes. Objectif : élever mon indice de sensibilité, partager quelques éclairs de gaité et une place sous le soleil, exactement. L’or git au milieu d’elles. Je m’installe entre leurs deux serviettes.
Plus tard, allongées sur la plage, tout au creux de mes bras, à défaut de poser, elles déposent dans mes oreilles des mots en cascade, des douceurs de coquillages, des chants de baleine, des langueurs de naïade, des rêves de noyade, des froissements d’ailes, des bruissements d’elles. Egéries.
Et je ris. Comme l’enfant que j’étais. Avant.

Rappel des contraintes
Le texte débute au présent et se termine à l’imparfait.
Le mode de narration est à la première personne du singulier, en « Je » donc.
Il y a trois personnages, pas moins, mais pas davantage.
Le décor est balnéaire : plage, bistrot sur bord de mer, dune, belvédère… que sais-je encore…
Dialogue obligatoire : minimum cinq échanges et plus si affinités.
Référence textuelle obligatoire à John Fante : citation, titre de bouquin, réplique cinématographique, qu’importe mais signée John Fante.
Titre de sept syllabes. 1500 caractères.

Polyphonique, polysémique... du bon Rebecca, allegro ma non troppo. Léger et inconséquent comme une journée à la plage.

Je vais finir "inconditionnelle"... ou "fan". (et pourtant, c'est pas du tout mon truc, d'être "fan" de...)

"joli" Rebecca, et dans le sens noble du terme

Pour le lecteur que je suis, trop de jeux de mots, même si très bien servis. Jolie façade oui, mais qu'en est-il des appartements ?

Comme j'aime autant les mots que leurs reflets réfractés à l'infini, je me suis régalée sans secouer mes sandales pleine de sable.

Les jeux de mots sont les points saillants qui occultent, ou plutôt : détournent l'attention du lecteur d'un sens sous-jacent flou, fuyant, subtil, incertain. Mais comme j'adore qu'on me balade qu'on me berlure... j'ai beaucoup aimé !

Drôlement bien fichu, Rebecca. Tu assures grave. Je trouve personnellement que tu abuses un peu des jeux sur les mots, même si ça tient indéniablement la route, mais il me semble que c'est un peu trop, comme un écran de fumée, léger certes, mais présent.
Cela dit, chapeau, une fois de plus.
Papy grognon.

Un texte qui semble se balader avec une nonchalance réjouissante. Un amusant instant de rencontre qui se termine dans la joie.

On peut apprécier les jeux de mots à n’en plus finir, très fouillés, le plus souvent. Mais pour moi, ils ne font pas tous image : « s’affale puis s’affole » « se cache à l’eau ». Je ne suis pas certaine que cela apporte une dynamique, il se peut même qu’elle vienne la rompre un peu. C’est sûr, je n’aurais pas su trouver ni placer un dixième de ses clins d’œil, mais même si certains donnent la cadence au texte, il m’ont plus dérangée qu’autre chose.
En tout cas, merci de cet instant de lecture.

Oui ! J'ai bien aimé, Rebecca ! Un texte protéiforme, même si parfois, les jeux de mots paraissent un peu forcés je trouve, cette fois-ci en tout cas. Leur abondance a tendance à déconcentrer pour qui ne les apprécierait pas... heureusement que ce n'est pas mon cas, donc.
Du bon Rebecca à n'en pas douter !

Moi aussi j'ai tendance à dire que je n'aime pas les jeux de mots mais, en fait, à bien réfléchir c'est parce que je ne sais pas faire. Pure jalousie donc.
Tu assures grave, en effet, comme dirait "Silène".

Pas convaincue par ce que tu racontes mais ton plaisir d'écrire reste manifeste et c'est ce que je retiendrais.

Ha ben voilà, quand je lis ça, je sais pourquoi je n'ai pas tenté, parce que pas capable ! :-)
Dis donc, c'est bien mené je trouve, non seulement pour le respect des contraintes pas simples mais ausis pour l'atmosphère générale du récit, vive et emportée, comme j'aime, avec quelques ritournelles bien plaisantes.

Je rejoins Aire_Azul : de belles prouesses dans l'art de jouer avec les mots mais du coup, le reste, l'histoire, passe au second plan et ne sert plus que de support fragile. Peut-être à doser un peu...