CONTE: Cherchez pas, y a pas de licorne! (exercice)

Il était une fois un affreux garnement prénommé Pierre.

Agé de quatorze ans, il passait son temps à piquer de l'argent dans le porte-monnaie de sa mère, à siffler en cachette le meilleur whiskey de son père et à placer des obstacles sur le parcours de sa grand-mère aveugle. Evidemment, face à un tel comportement, les parents ne pouvaient que se lamenter et les crises se succédaient. Que faire de ce remuant énergumène?
Un soir d'été, Pierre les entendit évoquer l'idée de le placer dans un internat, une maison à l'éducation stricte qui lui ferait sans doute le plus grand bien. Furieux et s'estimant trahi, l'adolescent entra dans une colère noire, fit irruption dans la pièce et reprocha à ses parents de vouloir se débarrasser de lui alors que le rôle de tout parent est de s'occuper de son enfant pour le meilleur et pour le pire. Décontenancé, le père se leva, la main tendue, prêt à gifler Pierre pour qu'il arrête de les insulter. Sur la défensive, ce dernier s'empara d'un tisonnier, frappa l'homme avec violence au visage et le tua sur le coup. Réalisant, certes trop tard, la gravité de son geste, le jeune garçon quitta le domicile et s'enfuit, courant à travers champs, la peur au ventre et des frissons sur la peau.

En chemin, il croisa la route d'un chien galeux et maigrelet, la bave au menton et le grognement au bord du museau. Il lui lança un biscuit qui traînait dans sa poche, l'appela doucement. L'animal s'approcha, se laissa caresser et, sans doute heureux à l'idée de cette nouvelle compagnie, se blottit contre Pierre qui s'endormit au milieu des blés.

Au petit matin, Pierre fut réveillé par un sifflement. Il ouvrit les yeux et regarda autour de lui, il aperçut une jeune fille qui tapait dans les mains et criait à tout va pour chasser les corbeaux affamés s'attaquant à sa récolte.
- Salut, je m'appelle Pierre!
- Vous n'avez rien à faire ici, répondit-elle, c'est une propriété privée, allez-vous en!
Elle lui tourna le dos et partit. Partagé entre l'étonnement et la colère, Pierre la suivit au loin, traversant bosquets et prairies avant d'aboutir devant l'entrée d'un immense domaine. Pour sûr, cette fille devait être aristocrate.
- Il me la faut! pensa Pierre en proie au démon de l'avidité et de la vengeance.
Il pénétra dans la propriété et traîna un peu dans une vaste cour, avant d'apercevoir à nouveau la jeune fille.
- Que faites-vous ici?
– Je cherche du travail. Auriez-vous quelque chose pour moi?
– Je ne suis pas la responsable, c'est à mon père qu'il faut vous adresser, le domaine est à lui. Je vais vous y conduire, suivez-moi.

Pierre suivit la demoiselle qui le mena à l'écurie. Un homme d'un certain âge y discutait avec un palefrenier, le réprimandant pour des soins mal donnés à une superbe jument.
– Que voulez-vous?
– Je cherche du travail.
– Je vous prends à l'essai pendant une semaine. Si vous convenez, je vous engage. Allez me ramasser tous les ballots de foin qui sont entreposés dans la cour et rentrez-les à l'étable, on annonce de l'orage.
Pierre s'exécuta, le propriétaire n'eût aucun remerciement pour lui. Le soir tomba, le travailleur trouva refuge avec son animal dans un gros tas de paille entreposé dans la grange et s'endormit avec la boule de poils dans les bras.

Le lendemain, le père de la jeune fille lui donna de nouvelles instructions que Pierre accomplit à la lettre.
La semaine arriva à son terme et lorsque le jeune homme se présenta devant son employeur pour obtenir son salaire et la poursuite de son contrat, quelle ne fut pas sa surprise de l'entendre lui répondre qu'il faisait du mauvais travail et qu'il ne voulait pas de lui dans sa ferme.
Ulcéré, Pierre quitta la propriété avec son chien, bien décidé à faire payer à l'odieux bonhomme le mauvais tour qu'il lui avait joué.
Sur la route qui devait le conduire au village le plus proche, il croisa la fille du patron. Agissant sur un coup de sang, Pierre l'assomma et la traîna dans les fourrés. Il la roua de coups, avant de lui arracher ses vêtements et de profiter avec bestialité de son innocence désormais perdue. Inconsciente, la jeune fille ne pouvait se débattre, ce qui décupla la férocité de Pierre qui lui asséna un coup fatal avec une pierre tranchante. Il l'abandonna aux fourmis, satisfait à l'idée du chagrin que la disparition de la jeune femme allait provoquer chez son imbécile de père. Bien fait pour lui, Pierre s'estimait vengé!

Les semaines passèrent, Pierre vivait en vagabond avec son chien trouvé, au milieu de la forêt, il avait faim et les lièvres se faisaient rares à cause de la saison de la chasse. Affamé, Pierre perdait la tête, il voyait le visage de la jeune fille dans ses rêves et se réveillait en hurlant. Le temps passa, le garçon avait de plus en plus faim. Dévoré par la folie et la solitude, il était en proie à de violentes hallucinations.
N'y tenant plus, il saisit son chien par le cou, l'étrangla, lui enfonça une branche de part et d'autre du corps, avant d'allumer un feu et de faire griller la chair pas vraiment tendre mais indispensable à son estomac.

Cet acte commis, l'esprit de Pierre n'avait plus de limites à la barbarie. Il reprit la route de la ferme qui l'avait exploité…