Saint Truc, saint Machin et les autres...

SAINT TRUC, SAINT MACHIN ET LES AUTRES

« Saint Truc Saint Machin toujours il pleuvait
Dans le coin du bar au sec on s’aimait »

(La Saint Médard, interprété par les Frères Jacques)

On ne saurait mieux dire. Les saints régentent notre quotidien. Pas un jour de l’année, qu’il pleuve ou qu’il fasse beau, qui ne soit consacré à l’un d’entre eux, contraignant l’Eglise à des révisions cycliques du calendrier, lorsque ce n’était pas à des purges drastiques. Un saint chasse l’autre, même si certains restent indéboulonnables.

Il en est même de fantaisie. Saint Glingin, qui n’existe que dans une locution populaire, évoque ainsi un jour qui, tel le mirage du désert devant l’assoiffé, se carapate à mesure qu’on cherche à l’attraper. C’est dommage. On aurait aimé fêter Saint Glinglin, de préférence au début de la semaine des quatre jeudis, qui s’achève, comme il se doit, par les calendes grecques. Autant dire qu’on n’est pas près de la voir.

C’est aussi le cas de Saint Frusquin. Ce dernier est fort commode, même s’il reste imaginaire. Dès qu’on ne sait plus quoi rajouter, on fait appel à ses mânes pour clore l’énumération. Il est en quelque sorte la voiture-balai du discours.

Saint Médard, qui pourrit la météo durant quarante jours s’il a envie de prendre sa douche, a en revanche bel et bien existé. Sans doute ne s’est-il pas lavé suffisamment de son vivant. Il faut dire qu’il avait autre chose à faire. L’époque n’était pas propice aux ablutions prolongées ou aux bains relaxants. Il y avait un royaume à bâtir, des barbares à exterminer, Clovis à convertir. Peut-être même recoller les débris du vase de Soissons, ce qui ne dut pas être une mince affaire : on en parle encore.

Saint Nicolas a la cote, lui. Les enfants ne tarissent pas d’éloges sur sa bonté, sa générosité et l’abondance de sa barbe neigeuse. Pourtant, de son vivant, il ne faisait pas l’unanimité. Au concile de Nicée, en 325, il fut l’un de ceux qui prêchèrent le plus véhémentement pour l’excommunication du théologien Arius, qui eut le tort de nier la consubstantialité du Père et du Fils, hérésie inexpiable s’il en est. Ses partisans, baptisés ariens, furent persécutés dans toute la chrétienté jusqu’à ce qu’il n’en reste aucun. Cela prit du temps : il y en avait beaucoup. On ne badinait pas avec la consubstantialité, de ce temps-là.

Enfin, on ne saurait clore cette hagiographie sans ce référer au saint du jour : Sylvestre. Le concile où fut condamné Arius se tint sous son pontificat. En effet, il succéda à Miltiade comme 33ème successeur de Saint Pierre et joua un rôle de premier plan dans la conversion de l’Empereur Constantin et l’établissement du christianisme comme religion d’Etat. Si l’on célèbre encore la fin de l’année en son nom, c’est uniquement parce qu’il mourut le 31 décembre 335. On ne réveillonna pas cette année-là.

Saint Gobu