FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
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Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Je ne me fais pas de souci pour toi : tes textes de qualité me le prouvent assez !
Invité- Invité
le début de je ne sais pas quoi
Vous est-il déjà arrivé de songer « C’est fini ». De prononcer ces trois mots à voix basse, le jour ne s’est pas encore levé, le corps marque le matelas de son empreinte, et les paupières sont lourdes encore du sommeil inachevé. Et pourtant ces trois mots résonnent aussi clairement que si vous les aviez prononcés à voix haute. Le corps de votre conjoint à vos côtés, sa respiration calme, à peine ponctuée de ronflements sporadiques, rythme les minutes, un répit avant la sonnerie du réveil, et vous les yeux grand ouverts fixent le plafond et votre conscience martèle cette phrase « C’est fini ». Votre vie n’est pas insupportable, loin de là. Mais la lassitude s’est installée inexorablement, elle a construit son nid et s’y est lovée, dès le travail achevé, pour ne plus le quitter. Elle pèse et engourdit vos membres. Chaque matin, vous parvenez encore à effectuer les gestes du quotidien, à déposer les tranches de pain dans le toaster, à verser le café dans les porcelaines précieuses, à afficher le sourire de circonstance et à faire mine de ne pas voir les miettes sur la table. Et jour après jour, cela vous demande un effort surhumain. Pourtant, vous continuez, sous peine de voir la façade se lézarder.
Et ce matin. Trois mots, trois mots que vous osez enfin prononcer à voix haute devant votre miroir après tant d’années passées à les penser en frissonnant de peur qu’on vous entende. Vous n’avez pas eu d’enfants, heureusement. Les enfants possèdent un sixième sens et en cet instant précis, vous vous sentez totalement incapable de feindre ce rôle qui vous est habituellement dévolu. Vous fixez le réveil, trente minutes de rémission encore avant que vous ne soyez obligée d’endosser le masque habituel. Vous passez en revue ce que cette journée pourrait bien avoir d’inhabituel et qui marquerait ainsi votre esprit. Mais rien ne vous frappe, la litanie des doléances, conjoint, voisins, quémandeurs confondus L’une ou l’autre œuvre de bienfaisance, vous ne travaillez pas c’est entendu. Ou bien alors bénévolement, charitablement comme il sied à l’épouse d’un fonctionnaire en représentation dans une région qui n’est pas la sienne et dont il sent confusément qu’elle est indigne de lui. Vous êtes présente, bienveillante, transparente, et vous transmettez, si vous le jugez nécessaire, aux oreilles de Monsieur votre Epoux. Vous arbitrez. Incontournable donc. En apparence.
Mais aujourd’hui, c’est fini. Vous vous êtes perdue. Hors de question de passer le reste de votre vie à vous réveiller avec ces trois mots en tête. Vous risquez de devenir totalement cinglée sinon, et jusqu’à preuve du contraire, c’est peut-être ce qui s’est déjà produit. Quoi qu’il en soit, il est temps d’agir. Vous fixez toujours le plafond et les minutes s’égrènent, digitales. Vous n’êtes pas malade, une opération bénigne quelques années plus tôt et qui s’est malheureusement soldée sans aucune séquelle. Quant au suicide, hors de question ! Qui veillerait sur le salut de son âme ? Et sur celui de son bienheureux Rodolphe qui consacrait sa vie entière au bien-être de ses compatriotes.
Pas de maladie mortelle, pas de suicide. Quelle serait la solution qui vous permettrait de passer de vie à trépas, sans culpabilité face aux survivants, sans heurts. Un jour, je suis, un jour je ne suis plus.
Et ce matin. Trois mots, trois mots que vous osez enfin prononcer à voix haute devant votre miroir après tant d’années passées à les penser en frissonnant de peur qu’on vous entende. Vous n’avez pas eu d’enfants, heureusement. Les enfants possèdent un sixième sens et en cet instant précis, vous vous sentez totalement incapable de feindre ce rôle qui vous est habituellement dévolu. Vous fixez le réveil, trente minutes de rémission encore avant que vous ne soyez obligée d’endosser le masque habituel. Vous passez en revue ce que cette journée pourrait bien avoir d’inhabituel et qui marquerait ainsi votre esprit. Mais rien ne vous frappe, la litanie des doléances, conjoint, voisins, quémandeurs confondus L’une ou l’autre œuvre de bienfaisance, vous ne travaillez pas c’est entendu. Ou bien alors bénévolement, charitablement comme il sied à l’épouse d’un fonctionnaire en représentation dans une région qui n’est pas la sienne et dont il sent confusément qu’elle est indigne de lui. Vous êtes présente, bienveillante, transparente, et vous transmettez, si vous le jugez nécessaire, aux oreilles de Monsieur votre Epoux. Vous arbitrez. Incontournable donc. En apparence.
Mais aujourd’hui, c’est fini. Vous vous êtes perdue. Hors de question de passer le reste de votre vie à vous réveiller avec ces trois mots en tête. Vous risquez de devenir totalement cinglée sinon, et jusqu’à preuve du contraire, c’est peut-être ce qui s’est déjà produit. Quoi qu’il en soit, il est temps d’agir. Vous fixez toujours le plafond et les minutes s’égrènent, digitales. Vous n’êtes pas malade, une opération bénigne quelques années plus tôt et qui s’est malheureusement soldée sans aucune séquelle. Quant au suicide, hors de question ! Qui veillerait sur le salut de son âme ? Et sur celui de son bienheureux Rodolphe qui consacrait sa vie entière au bien-être de ses compatriotes.
Pas de maladie mortelle, pas de suicide. Quelle serait la solution qui vous permettrait de passer de vie à trépas, sans culpabilité face aux survivants, sans heurts. Un jour, je suis, un jour je ne suis plus.
Yellow_Submarine- Nombre de messages : 278
Age : 53
Localisation : Fougères
Date d'inscription : 08/01/2010
toujours un je ne sais quoi
Vous est-il déjà arrivé de songer « C’est fini ». De prononcer ces trois mots à voix basse, le jour ne s’est pas encore levé, le corps marque le matelas de son empreinte, et les paupières sont lourdes encore du sommeil inachevé. Et pourtant ces trois mots résonnent aussi clairement que si vous les aviez prononcés à voix haute. Le corps de votre conjoint à vos côtés, sa respiration calme, à peine ponctuée de ronflements sporadiques, rythme les minutes, un répit avant la sonnerie du réveil, et vous, les yeux grand ouverts, qui fixent le plafond et votre conscience qui martèle cette phrase « C’est fini ». Votre vie n’est pas insupportable, loin de là. Mais la lassitude s’est installée inexorablement, elle a construit son nid et s’y est lovée, dès le travail achevé, pour ne plus le quitter. Elle pèse et engourdit vos membres. Chaque matin, vous parvenez encore à effectuer les gestes du quotidien, à déposer les tranches de pain dans le toaster, à verser le café dans les porcelaines précieuses, à afficher le sourire de circonstance et à faire mine de ne pas voir les miettes sur la table. Et jour après jour, cela vous demande un effort surhumain. Pourtant, vous continuez, sous peine de voir la façade se lézarder.
Et ce matin. Trois mots, trois mots que vous oserez enfin prononcer à voix haute devant votre miroir après tant d’années passées à les penser en frissonnant de peur qu’on vous entende. Vous n’avez pas eu d’enfants, heureusement. Les enfants possèdent un sixième sens et en cet instant précis, vous vous sentez totalement incapable de feindre ce rôle qui vous est habituellement dévolu. Vous fixez le réveil, trente minutes de rémission encore avant que vous ne soyez obligée d’endosser le masque habituel. Vous passez en revue ce que cette journée pourrait bien avoir d’inhabituel et qui marquerait ainsi votre esprit. Mais rien ne vous frappe, la litanie des doléances, conjoint, voisins, quémandeurs confondus L’une ou l’autre œuvre de bienfaisance, vous ne travaillez pas c’est entendu. Ou bien alors bénévolement, charitablement comme il sied à l’épouse d’un fonctionnaire en représentation dans une région qui n’est pas la sienne et dont il sent confusément qu’elle est indigne de lui. Vous êtes présente, bienveillante, transparente, et vous transmettez, si vous le jugez nécessaire, aux oreilles de Monsieur votre Epoux. Vous arbitrez. Incontournable donc. En apparence.
Mais aujourd’hui, c’est fini. Vous vous êtes perdue. Hors de question de passer le reste de votre vie à vous réveiller avec ces trois mots en tête. Vous risquez de devenir totalement cinglée sinon, et jusqu’à preuve du contraire, c’est peut-être ce qui s’est déjà produit. Quoi qu’il en soit, il est temps d’agir. Vous fixez toujours le plafond et les minutes s’égrènent, digitales. Vous n’êtes pas malade, une opération bénigne quelques années plus tôt et qui s’est malheureusement soldée sans aucune séquelle. Quant au suicide, hors de question ! Qui veillerait sur le salut de son âme ? Et sur celui de votre bienheureux Rodolphe qui consacre sa vie entière au bien-être de ses compatriotes. Sans compter que jamais votre confesseur ne vous le pardonnerait.
Pas de maladie mortelle, pas de suicide. Quelle est cette solution qui vous permettrait de passer de vie à trépas, sans culpabilité face aux survivants, sans heurts ? Un jour, je suis, un jour je ne suis plus. Trop facile. Pas de pilule bleue non plus, simulacre de la félicité. « J’arbore un masque suffisamment béat comme cela.» pensa-t-elle. Elle regarda huit heures s’afficher sur le calendrier et son conjoint s’extirper avec difficulté de la couette et elle pensa une fois encore « C’est fini ». Quoi, comment, elle n’en avait aucune idée. Mais une seule certitude : elle ne pourrait pas continuer comme cela indéfiniment. Ni même temporairement. Il en allait du salut de son âme, tout du moins de sa santé mentale. Et à cela, elle y tenait comme à la prunelle de ses yeux.
Et ce matin. Trois mots, trois mots que vous oserez enfin prononcer à voix haute devant votre miroir après tant d’années passées à les penser en frissonnant de peur qu’on vous entende. Vous n’avez pas eu d’enfants, heureusement. Les enfants possèdent un sixième sens et en cet instant précis, vous vous sentez totalement incapable de feindre ce rôle qui vous est habituellement dévolu. Vous fixez le réveil, trente minutes de rémission encore avant que vous ne soyez obligée d’endosser le masque habituel. Vous passez en revue ce que cette journée pourrait bien avoir d’inhabituel et qui marquerait ainsi votre esprit. Mais rien ne vous frappe, la litanie des doléances, conjoint, voisins, quémandeurs confondus L’une ou l’autre œuvre de bienfaisance, vous ne travaillez pas c’est entendu. Ou bien alors bénévolement, charitablement comme il sied à l’épouse d’un fonctionnaire en représentation dans une région qui n’est pas la sienne et dont il sent confusément qu’elle est indigne de lui. Vous êtes présente, bienveillante, transparente, et vous transmettez, si vous le jugez nécessaire, aux oreilles de Monsieur votre Epoux. Vous arbitrez. Incontournable donc. En apparence.
Mais aujourd’hui, c’est fini. Vous vous êtes perdue. Hors de question de passer le reste de votre vie à vous réveiller avec ces trois mots en tête. Vous risquez de devenir totalement cinglée sinon, et jusqu’à preuve du contraire, c’est peut-être ce qui s’est déjà produit. Quoi qu’il en soit, il est temps d’agir. Vous fixez toujours le plafond et les minutes s’égrènent, digitales. Vous n’êtes pas malade, une opération bénigne quelques années plus tôt et qui s’est malheureusement soldée sans aucune séquelle. Quant au suicide, hors de question ! Qui veillerait sur le salut de son âme ? Et sur celui de votre bienheureux Rodolphe qui consacre sa vie entière au bien-être de ses compatriotes. Sans compter que jamais votre confesseur ne vous le pardonnerait.
Pas de maladie mortelle, pas de suicide. Quelle est cette solution qui vous permettrait de passer de vie à trépas, sans culpabilité face aux survivants, sans heurts ? Un jour, je suis, un jour je ne suis plus. Trop facile. Pas de pilule bleue non plus, simulacre de la félicité. « J’arbore un masque suffisamment béat comme cela.» pensa-t-elle. Elle regarda huit heures s’afficher sur le calendrier et son conjoint s’extirper avec difficulté de la couette et elle pensa une fois encore « C’est fini ». Quoi, comment, elle n’en avait aucune idée. Mais une seule certitude : elle ne pourrait pas continuer comme cela indéfiniment. Ni même temporairement. Il en allait du salut de son âme, tout du moins de sa santé mentale. Et à cela, elle y tenait comme à la prunelle de ses yeux.
Yellow_Submarine- Nombre de messages : 278
Age : 53
Localisation : Fougères
Date d'inscription : 08/01/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Un début, oui, qui commence par une fin ... Pourquoi pas ? Osez Joséphine... pardon, Submarine !
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Elle, ça s’voyait bien qu’ça l’arrangeait d’être là, elle me connaissait pas, la réciproque me convenait. Aux commandes d’un truc pour cordes, un violoniste enflammait nos entrailles. Tous les deux à s’regarder dans les yeux, elle, des perles grosses comme le poing, dedans et dehors les globes, c’est elle qui bâillonnait ce chiffon, moi, plein d’amour au bout ma scie... j’la fait toujours rentrer en premier, question d’amplitude thermique... j’adore leurs dire que c’est pas grave de m’avoir suivi, qu’elles savaient déjà, que c’était le sens à donner au tragique grec, mais elles cherchent toujours à fuir ce qu’elles sont... Celle-là, elle est marrante, j’sens bien qu’elle a envie de parler... j’sens bien sa gêne, qu’elle s’dit dommage si j’avais su... Mais elles comprennent jamais rien, la violence c’est pas ce que j’vais leur faire, la violence c’est l’irréversible, c’est la colle sur le papier tue-mouches, c’est le couperet qui te fend la chatte, qui t’asperge de vie en grumeaux, c’est le temps palpable, celui du sablier qui postillonne... Alors je leur explique comment je procède, mes p’tites huitres... je leur montre l’azote liquide dans sa bonbonne, j’la fais tinter avec la pince que j’balance lentement devant leurs yeux, j’leur demande si ça leur plait comme dernier paysage, elles savent que j’vais leur arracher les yeux, leur injecter de l’adré, les fendre par le milieu et en crachant dans leur bain d’organes verser l’azote dans les grottes oculaires, cerveau congelé... généralement elles font les biches... tiens qu’est-ce que j’dis, y a la conne qui s’effondre... un peu de respect merde, j’cogne ses seins, j’écorche son menton... et l’art... collecter comme ça, dans la tête des gens, ça mérite ! Elle croit que c’est pourquoi qu’elle s’est réveillée attachée blanche neige ? T’es filmée souillon, tu vas figer l’éphémère, à toi toute seule les frères Bogdanov !
Jérémie- Nombre de messages : 412
Age : 47
Localisation : Sixfeetunder
Date d'inscription : 27/03/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
De l'Amerian psycho légèrement dilué, les Bogdanov en plus, il est vrai.
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Maurine la page
Lorsque nous étions mâchées, ma mère me le disait, pour tout et n’importe quoi d’ailleurs, sans rature, sans maquillage, nous sommes magnifiques, un trésor de perfections. Le mimétisme écrasant du beau pour piéger, appâter et surtout ne jamais se laisser prendre, des crépons souriants, faire comme les duchesses, passer sans regard pour le peuple, de la distinction en quelque sorte.
Tous ces prétendants, j’aime à les penser ouvriers écrivains couverts de bleus, hypnotisés par l’angoisse, écœurement aux extrémités, leur solitude, les savoir hésitant, rechignant, transportés, gommant leurs traces. J’aime me dire qu’eux seuls réverbèrent le long d’une marge un trottoir pour égotiques, une sorte de tapin gazeux… grâce à moi. J’adore, je les regarde, ils me voient à peine, battent des cils puis soufflent tout au plus.
J’en connaissais un qui passait son temps à gribouiller ses fantasmes, un faussaire de l’imposture, un autre qui me grattait des insanités, une certaine qui allait jusqu’à me lécher la trogne tant elle croyait pondre des dieux. Plus d’un m’aimait.
Mais maintenant, je m’en fous. Je tricote peinarde, je déplie mes jambes, je corne mes ongles en marque page.
J’aime y songer légèrement, moi je suis fromage de chèvre, yaourt, oui le blanc c’est dans mes gènes, pas le translucide… le blanc… c’est muet, ça rend fou une page blanche, tant ça garde, ça regarde, croyez-moi. Ce n’est pas vide, c’est sans fond, l’infini en A4, le spectre dans sa définition la plus collective, un drap tabassé d’horizons, aplati jusqu’à le faire rapetisser puis tenir dans une ramette. Virginale, le but ultime, la pro-création, après moi plus pareil. Je me fais penser à cette pisseuse aux épaules trop musclées, mais si, cette malheureuse chantilly de femme qu’on envoie dire oui n’importe comment : un moindre mouvement et je tremble, tout le monde me marche dessus, personne n’est gêné de me noircir, me rentrer dedans, m’engrosser, au bout du compte, je suis la princesse du rêve d’un autre.
Lorsque nous étions mâchées, ma mère me le disait, pour tout et n’importe quoi d’ailleurs, sans rature, sans maquillage, nous sommes magnifiques, un trésor de perfections. Le mimétisme écrasant du beau pour piéger, appâter et surtout ne jamais se laisser prendre, des crépons souriants, faire comme les duchesses, passer sans regard pour le peuple, de la distinction en quelque sorte.
Tous ces prétendants, j’aime à les penser ouvriers écrivains couverts de bleus, hypnotisés par l’angoisse, écœurement aux extrémités, leur solitude, les savoir hésitant, rechignant, transportés, gommant leurs traces. J’aime me dire qu’eux seuls réverbèrent le long d’une marge un trottoir pour égotiques, une sorte de tapin gazeux… grâce à moi. J’adore, je les regarde, ils me voient à peine, battent des cils puis soufflent tout au plus.
J’en connaissais un qui passait son temps à gribouiller ses fantasmes, un faussaire de l’imposture, un autre qui me grattait des insanités, une certaine qui allait jusqu’à me lécher la trogne tant elle croyait pondre des dieux. Plus d’un m’aimait.
Mais maintenant, je m’en fous. Je tricote peinarde, je déplie mes jambes, je corne mes ongles en marque page.
J’aime y songer légèrement, moi je suis fromage de chèvre, yaourt, oui le blanc c’est dans mes gènes, pas le translucide… le blanc… c’est muet, ça rend fou une page blanche, tant ça garde, ça regarde, croyez-moi. Ce n’est pas vide, c’est sans fond, l’infini en A4, le spectre dans sa définition la plus collective, un drap tabassé d’horizons, aplati jusqu’à le faire rapetisser puis tenir dans une ramette. Virginale, le but ultime, la pro-création, après moi plus pareil. Je me fais penser à cette pisseuse aux épaules trop musclées, mais si, cette malheureuse chantilly de femme qu’on envoie dire oui n’importe comment : un moindre mouvement et je tremble, tout le monde me marche dessus, personne n’est gêné de me noircir, me rentrer dedans, m’engrosser, au bout du compte, je suis la princesse du rêve d’un autre.
Jérémie- Nombre de messages : 412
Age : 47
Localisation : Sixfeetunder
Date d'inscription : 27/03/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
J'aime bien quand je devine entre les lignes ... Tout ce blanc ! C'est trop bon, elle a raison Coline !
La théière s'est fait la malle
Nous l’avions volontiers admise à notre table et avions éteint le plafonnier pour laisser toute ses chances à la lueur pâle de la bougie qui trônait au beau milieu des assiettes. Elle avait geint, du moins l’avions nous cru alors, et nous nous étions empressés de la rassurer, de peur qu’elle n’ait fui avant le dessert. D’aucuns auraient médit de notre empressement suspect, mais nous n’étions pas –encore – animés d’intentions malsaines. Qu’y aurait-il eu de malsain d’ailleurs à l’avoir mordue, tant sa chair était appétissante sous sa robe trempée de la pluie qui ne cessait de tomber au dehors. Nous l’avions servi copieusement et son assiette regorgeait maintenant de viandes saupoudrées de safran moulu et de légumes frais généreusement oints d’un coulis de tomates. Elle ne se doutait pas le moins du monde de ce qui, imperceptiblement, s’était ourdi contre elle et mangeait de bonne grâce, ses ongles peints plantés dans la miche de pain frais qu’elle portait goulument à sa bouche. Confortablement assise en face de nous, elle laissait peu à peu la peur, le froid et la faim céder place à la douce torpeur qui accompagnait la satiété. Bientôt vaincue par les effluves du vin capiteux dont nous l’avions abreuvée, elle s’assoupit, les bras ballant le long du corps et le visage à demi enfoui dans sa serviette. Il était grand temps, car notre faim avait atteint son comble et nous n’aurions pu nous résoudre à la dévorer avant qu’elle n’eût achevé son dernier repas. Les convenances, voyez-vous ; on ne se refait pas.
C'était un retour de flamme pour l'exo en direct d'hier, avant que je ne m'aperçoive que j'avais complètement zappé la théière... Je le poste pour pas gacher ;-)
Contraintes : écrire un texte à propos d'une galère autour d'un objet (une théière en l'occurence). Prière de caser autant de participes passés (employés ou non comme adjectifs) de ces verbes : admettre - éteindre - geindre - fuir -médire - mordre - moudre - oindre - ourdir - peindre - s’asseoir – vaincre
C'était un retour de flamme pour l'exo en direct d'hier, avant que je ne m'aperçoive que j'avais complètement zappé la théière... Je le poste pour pas gacher ;-)
Contraintes : écrire un texte à propos d'une galère autour d'un objet (une théière en l'occurence). Prière de caser autant de participes passés (employés ou non comme adjectifs) de ces verbes : admettre - éteindre - geindre - fuir -médire - mordre - moudre - oindre - ourdir - peindre - s’asseoir – vaincre
labyrinthe de l'humanité n°1
au loin mes pas s'effacent.c'est le crépuscule qui les engloutit, faute d'âmes saignantes et de corps confus.je ne saurais plus retourner d'ou je viens, il me faudra briser ces portes encore emmurées, ou bien tourner en rond en laissant ma rage franchir les déserts et les isoloirs...
endjel eriennon- Nombre de messages : 39
Age : 28
Localisation : Fort fort loin.
Date d'inscription : 20/10/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Mais c'est pas vrai ? Vous vous êtes donnés le mot ?
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Bon, sinon, bienvenue ici quand même.
Il existe un fil dédié aux fragments de textes. En l'occurrence, ce texte-ci me paraît trop court pour figurer sous cette forme dans le catalogue.
Il serait bien aussi de faire des efforts en typographie (règles élémentaires de majuscules, quoi !)...
Il existe un fil dédié aux fragments de textes. En l'occurrence, ce texte-ci me paraît trop court pour figurer sous cette forme dans le catalogue.
Il serait bien aussi de faire des efforts en typographie (règles élémentaires de majuscules, quoi !)...
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
si tu aimes pas c'est pas grave ^^ mais non je prend mes mots toute seule merci
endjel eriennon- Nombre de messages : 39
Age : 28
Localisation : Fort fort loin.
Date d'inscription : 20/10/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Ah d'accord désolée
C'est juste une habitude je le referais plus et je posterais là ou il faut!!!Pardon!
C'est juste une habitude je le referais plus et je posterais là ou il faut!!!Pardon!
endjel eriennon- Nombre de messages : 39
Age : 28
Localisation : Fort fort loin.
Date d'inscription : 20/10/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
endjel eriennon a écrit:si tu aimes pas c'est pas grave ^^ mais non je prend mes mots toute seule merci
On a tendance à se faire envahir par des petits rigolos en ce moment... j'ai supposé un instant que vous en faisiez partie.
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Disons que ça a tendance à m'agacer tout particulièrement en ce moment... ;-)
Invité- Invité
Très joliment cramé
Un AK47 entre les deux yeux et un paquets de cacahuètes grillées dans la main droite... je t'avais bien dit de pas faire confiance à ce clown... avec son beau maquillage coloré là ! qu'y ressemble à un oiseau de paradis...
endjel eriennon- Nombre de messages : 39
Age : 28
Localisation : Fort fort loin.
Date d'inscription : 20/10/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
(Me suis encore trompée d'endroit non je ne suis pas un petit rigolo!)
endjel eriennon- Nombre de messages : 39
Age : 28
Localisation : Fort fort loin.
Date d'inscription : 20/10/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
[Pas grave, tu voulais placé où ? Un modo va déplacer plus tard.
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
A placer ici je pense:
http://www.vosecrits.com/conversations-atelier-f4/fragments-le-fil-de-vos-textes-courts-t4385.htm
http://www.vosecrits.com/conversations-atelier-f4/fragments-le-fil-de-vos-textes-courts-t4385.htm
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Vous l’entendez, le percevez distinctement, ce bruit de réveil, strident, journalier ou presque. L’heure habituelle où vous vous levez est dépassée depuis bientôt trente minutes et pourtant, vous allez à nouveau retarder l’heure de l’alarme. Encore dix minutes. Et puis, il sera temps de vous interroger. Ne feriez-vous pas mieux de rester couché ? Cela vous éviterait d’avoir à vous presser, d’avoir à expliquer votre retard, de conforter votre réputation naissante de mauvais employé. Alors peut-être que oui, vous resterez allongé, sous les couvertures, blotti, au chaud, immobile comme si l’instant devait demeurer ainsi figé, sécurisé, conforté dans un bref laps de temps dénué de contrariété, de souci. Fuir votre quotidien est devenu votre obsession, votre casse-tête insoluble. Aujourd’hui, vous prétexterez une angine ou une migraine tenace.
Charles- Nombre de messages : 6288
Age : 49
Localisation : Hte Savoie - tophiv@hotmail.com
Date d'inscription : 13/12/2005
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Le troi de la sécu n'arrivera jamais à se combler tant qu'on n'aura pas la possibilité de prendre un jour de congé pour cause de bonheur...
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Coline, tu t'es trompéecoline Dé a écrit:Le trou de la sécu n'arrivera jamais à se combler tant qu'on n'aura pas la possibilité de prendre un jour de congé pour cause de bonheur...
c'est dans les aphorismes que ça devrait être posté ça
;-)
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Cocorico !
Trois minutes, c’est le temps de cuisson d’un œuf à la coque. C’est aussi ce qu’a duré mon premier rapport sexuel. Je vous fais grâce des quarante deux secondes de préliminaires. Mon mariage avec l’empressé qui m’a déflorée résiste depuis seize ans quatre mois et onze jours. Ce qui m’a laissé tout loisir d’apprendre à accommoder les œufs à diverses sauces.
Aujourd’hui, campée devant le miroir à tenter de répartir équitablement mes rondeurs dans une robe joliment corsetée, je m’interroge.
Aurai-je le courage ? Le courage de m’extirper du ronron abrutissant de mon quotidien. De revivre, de continuer d’avancer, d’aimer encore. De me rendre à ce rendez vous ce soir. J’ai rencontré un homme, il y a quelques semaines. Il me fait rire, ses mots font refluer mes larmes et je rêve de nouveau.
Mais j’ai peur de ne plus savoir ; tous ces gestes qui font vibrer l’autre, j’ai peur de les avoir oubliés. La raison a beau me souffler qu’une incursion manuelle dans le caleçon de l’intéressé devrait largement suffire à lancer la machine, mon cœur soupire après plus de sensualité romantique. À ses gestes, à ses regards, je le devine tendre et j’en ai tellement besoin. J’imagine mille et une caresses qu’il inventerait pour moi. J’aimerais les lui rendre au centuple. Et pouvoir me lover dans ses bras, à tout moment, sans devoir quémander ni justifier mes élans de tendresse.
J’enfile mon manteau.
En quittant l’appartement, je gribouille sur un post-it, que je colle sur une boîte à œufs : Trouve-toi une autre poule, chapon !
Trois minutes, c’est le temps de cuisson d’un œuf à la coque. C’est aussi ce qu’a duré mon premier rapport sexuel. Je vous fais grâce des quarante deux secondes de préliminaires. Mon mariage avec l’empressé qui m’a déflorée résiste depuis seize ans quatre mois et onze jours. Ce qui m’a laissé tout loisir d’apprendre à accommoder les œufs à diverses sauces.
Aujourd’hui, campée devant le miroir à tenter de répartir équitablement mes rondeurs dans une robe joliment corsetée, je m’interroge.
Aurai-je le courage ? Le courage de m’extirper du ronron abrutissant de mon quotidien. De revivre, de continuer d’avancer, d’aimer encore. De me rendre à ce rendez vous ce soir. J’ai rencontré un homme, il y a quelques semaines. Il me fait rire, ses mots font refluer mes larmes et je rêve de nouveau.
Mais j’ai peur de ne plus savoir ; tous ces gestes qui font vibrer l’autre, j’ai peur de les avoir oubliés. La raison a beau me souffler qu’une incursion manuelle dans le caleçon de l’intéressé devrait largement suffire à lancer la machine, mon cœur soupire après plus de sensualité romantique. À ses gestes, à ses regards, je le devine tendre et j’en ai tellement besoin. J’imagine mille et une caresses qu’il inventerait pour moi. J’aimerais les lui rendre au centuple. Et pouvoir me lover dans ses bras, à tout moment, sans devoir quémander ni justifier mes élans de tendresse.
J’enfile mon manteau.
En quittant l’appartement, je gribouille sur un post-it, que je colle sur une boîte à œufs : Trouve-toi une autre poule, chapon !
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Les arts, en anagramme
ni à l'endroit ni à l'envers
C'est l'art des bonnes manières
Et fait de nous des rats.
ni à l'endroit ni à l'envers
C'est l'art des bonnes manières
Et fait de nous des rats.
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Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Vivement le cimetière que j’ai droit à une visite par an et quelques fleurs.
C’est curieux de faire la tournée des morts mais pas celle des vivants. J’ai bien essayé de vivre dans une maison en forme de cercueil mais il parait que c’est de mauvais goût. Pourtant moins que de n’encenser une personne qu’une fois morte et enterrée.
Finalement je partirais sans laisser d’adresse, z’auront qu’à envoyer les géraniums poste restante.
C’est curieux de faire la tournée des morts mais pas celle des vivants. J’ai bien essayé de vivre dans une maison en forme de cercueil mais il parait que c’est de mauvais goût. Pourtant moins que de n’encenser une personne qu’une fois morte et enterrée.
Finalement je partirais sans laisser d’adresse, z’auront qu’à envoyer les géraniums poste restante.
elea- Nombre de messages : 4894
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Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Après le passage
On s'attache à ses habitudes, qu'il faut alors chasser. Je reprends le fil des mots gravés après un intermède-apprécié-de mots lancés dans nos souffles, sans se poser sur papier.
Le brun amené par le froid gagne les collines. J'ai perdu la lune ou peut-être m'a-t-elle égarée. Je l'imagine alors, grandissante en des nuits claires et tièdes, ailleurs, plus loin, où je peux aller les yeux fermés. Et je sais qu'elle me cherche et m'attend. Elle se posera dans le tilleul dont le feuillage clairsemé est encore pour elle, un abri sûr.
Les sentiers regorgent de cailloux qui ont tous une histoire, je les entraperçois et toi tu sais les conter.
Que n'ai-je appris à lire et écrire plus tôt ?
Silhouettes qui se croisent
parfois s'écrasent
dans les chemins tournants
des gouffres ou des monts
Les abysses ne sont que des montagnes inversées, dont les camaïeux de bleus aux noirs attirent et enchantent avant de repartir pour une palette de jaunes et de rouges. Les verts s'étalent de mars en octobre, éveillent la vie, tapis d'herbes douces pour main frissonnante, champ offert au vent pour qu'il y décline sa musique.
Alors ivres de couleurs éparpillées, les silhouettes s'animent pour une danse au fil de leurs désirs.
On s'attache à ses habitudes, qu'il faut alors chasser. Je reprends le fil des mots gravés après un intermède-apprécié-de mots lancés dans nos souffles, sans se poser sur papier.
Le brun amené par le froid gagne les collines. J'ai perdu la lune ou peut-être m'a-t-elle égarée. Je l'imagine alors, grandissante en des nuits claires et tièdes, ailleurs, plus loin, où je peux aller les yeux fermés. Et je sais qu'elle me cherche et m'attend. Elle se posera dans le tilleul dont le feuillage clairsemé est encore pour elle, un abri sûr.
Les sentiers regorgent de cailloux qui ont tous une histoire, je les entraperçois et toi tu sais les conter.
Que n'ai-je appris à lire et écrire plus tôt ?
Silhouettes qui se croisent
parfois s'écrasent
dans les chemins tournants
des gouffres ou des monts
Les abysses ne sont que des montagnes inversées, dont les camaïeux de bleus aux noirs attirent et enchantent avant de repartir pour une palette de jaunes et de rouges. Les verts s'étalent de mars en octobre, éveillent la vie, tapis d'herbes douces pour main frissonnante, champ offert au vent pour qu'il y décline sa musique.
Alors ivres de couleurs éparpillées, les silhouettes s'animent pour une danse au fil de leurs désirs.
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
J'assimile aujourd'hui notre beau rocher à un désert, avec ces crânes qui ne pensent pas, avec ces bouches qui ne parlent pas. Parfois, juste l'orgasme de papa qui déchirait le silence.
Dehors la campagne était superbe, nous étions suspendus à l'éternité glaciale de ces terres désolées, de ces arbres morts qui éclataient dans le vent, nous étions au plus loin, nous étions dans le ciel, comme le château de Magritte. Nous serions morts je veux dire à nous rouler dans la glaise et à nous lever toujours, couverts de mousse et de terre, et mon père ne lâchera plus sa bite ni sa télé, ma mère aura le sourire aux lèvres et son vagin obstrué par ma nuque, alors comment respirer, je devenais magique dans la femme qui est aussi la graine, je voyais toutes les formes de l'espace s'y mêler, comme quand je regardais du haut de notre serpentine les peuples vivants et les baobabs qui poussent vers le ciel. Nous pouvions tenir des années à ne respirer que de l'eau. Nous pouvions tenir des années à contempler l'espace béant du corps, au seuil de l'univers. Nous pouvions tenir des années à regarder les bactéries et jamais ne les gober, car il y a un endroit où les choses gravitent, et tombent, puis remontent, des bulles déraisonnées ayant l'odeur du feu. Bientôt viendra le temps de partir. La famille mourra.
A l’intérieur, les murs étaient verts. Nous nous étouffions avec le vide, nous mangions de l’orgueil en traînant nos pieds sales, nous pissions sur le sol, nous hurlions dans les urnes de vomi glacé. Surtout, nous n’ouvrions pas les fenêtres.
Le lien était coupé, les artères bouchées comme au premier rendez-vous avec la graisse. La mousse avait poussé sur les murs, les fenêtres et la langue : personne ne parlait, si ce ne sont les morts et leurs bouches rondes, engloutis sous les plantes.
Nous prenions des masques et allions avec prudence à l'extérieur des murs. Le crâne à peine immiscé dans l'air froid de juillet et déjà les ramures commençaient leur spectacle : les bonsaïs paraissent des mains lépreuses, les troncs en or balançaient, pendules, mesuraient notre temps. Les femmes enceintes, encore amassées, membres tordus, et les ventres, dressés vers le ciel sans un rayon d'espoir, offrant leur douleur. Les femmes enceintes, premières victimes, et leurs gosses, asphyxiés dans la prison de l'innocence. La grande secte des corps. La procréation est le cordon coloré de Dieu, le prétexte à l'éternité.
Ma mère avait fini par se relever. Je boutonnai mon pantalon et courus dehors.
J'étais dans la cave et l’absinthe faisait son effet, enlevait aux choses les odeurs de la vie. Dans la cour pavée située sur la falaise, je lorgnai les pièces noires avec circonspection. La douleur brunit les visages, et fait prendre à l’être tout entier l’allure du spasme.
Les parois sont touchées : de chaque côté, cela suinte en abondance, cela hurle, cela soulève, cela court vers nulle part. Les visages ont couru à travers toutes les plaines, et jamais une lumière.
En demi-mots, en foudroiements, en émissions alternatives, saccadées, et finalement en râles, épouvantables et longs, comme séparés de tout autre bruit — chairs frontières et l’absence d’un écho.
Les murs, comme des habitants, rampaient, soulevaient les tapis de leurs doigts velus, humides, et faisaient des ombres sur eux-mêmes. Les pleurs étaient tout seuls et habitaient les bruits. Bientôt, l'heure s'avança, et la lune, adjacente aux toits, souffla de doux rires aux reins de la montagne. L'enfant, avec sa coupe au bol, et la crasse aux fossettes de ses joues, est tout seul dans la cave, sous le sol. Une lumière macabre éclairait les murs de terre, et le ciel avait des reflets oranges par la lucarne, ouverte aussi aux vents et à ses cris. Le cri, lui, était bien plus éloquent que toute terreur, et encore bien plus éloquent que moi qui relate la nuit des derniers flancs du monde, qui reforme les chagrins de l'absinthe, cette gondole.
Il y a un seul point sensible : c’est la membrane autour de l’angoisse, avec ses rêves pâles et ses chaleurs d’argile.
Je voulais aller voir maman un peu, elle voulait bien que je dorme avec elle cette nuit, mais elle me dit tiens mon chéri ça n'est pas un peu malsain ça hein ? à ton âge tout de même, mais elle m'invita quand même à venir, elle était toute nue sous les draps, quelque chose puait, je ne sais pas, j'adorais cette puanteur, elle me dit de me rapprocher d'elle, je le fis, j'étais bien là sous son aisselle, elle me caressait un peu les côtes, ça me chatouillait, je lui dis d'arrêter et elle continua en rigolant à son tour, nous rigolions, elle me serra les fesses avec sa force de femme, elle riait toujours, puis je ne sais pas, je m'approchai de sa poitrine en me laissant envahir un peu plus par les draps, je me camouflai là-dessous comme on se camoufle derrière la peur, je me glissai là tout bas dans le berceau grisé de la sur-protection, je m'approchai de sa poitrine, je jouai au petit chat égorgé d'avant les jours, ma mère me dit si tu redevenais bébé, hein, et que tu me tétais un peu ?, alors je me frottai contre sa peau incendiée, j'étais amoureux, je pris le bout de son sein droit entre mes dents... puis ma mère continua à rire et c'est sa main qui glissa jusqu'à mon sexe, je voulus crier mais je ne pouvais pas, j'entendais mon père se masturber sur le canapé, le chien aboyer et broyer la viande sanguinolente, la télé bourdonner, puis les murs de la maison se resserrèrent, les étoiles s'y déposèrent, une par une, décollées du ciel comme on vomit l'amour.
Dehors la campagne était superbe, nous étions suspendus à l'éternité glaciale de ces terres désolées, de ces arbres morts qui éclataient dans le vent, nous étions au plus loin, nous étions dans le ciel, comme le château de Magritte. Nous serions morts je veux dire à nous rouler dans la glaise et à nous lever toujours, couverts de mousse et de terre, et mon père ne lâchera plus sa bite ni sa télé, ma mère aura le sourire aux lèvres et son vagin obstrué par ma nuque, alors comment respirer, je devenais magique dans la femme qui est aussi la graine, je voyais toutes les formes de l'espace s'y mêler, comme quand je regardais du haut de notre serpentine les peuples vivants et les baobabs qui poussent vers le ciel. Nous pouvions tenir des années à ne respirer que de l'eau. Nous pouvions tenir des années à contempler l'espace béant du corps, au seuil de l'univers. Nous pouvions tenir des années à regarder les bactéries et jamais ne les gober, car il y a un endroit où les choses gravitent, et tombent, puis remontent, des bulles déraisonnées ayant l'odeur du feu. Bientôt viendra le temps de partir. La famille mourra.
A l’intérieur, les murs étaient verts. Nous nous étouffions avec le vide, nous mangions de l’orgueil en traînant nos pieds sales, nous pissions sur le sol, nous hurlions dans les urnes de vomi glacé. Surtout, nous n’ouvrions pas les fenêtres.
Le lien était coupé, les artères bouchées comme au premier rendez-vous avec la graisse. La mousse avait poussé sur les murs, les fenêtres et la langue : personne ne parlait, si ce ne sont les morts et leurs bouches rondes, engloutis sous les plantes.
Nous prenions des masques et allions avec prudence à l'extérieur des murs. Le crâne à peine immiscé dans l'air froid de juillet et déjà les ramures commençaient leur spectacle : les bonsaïs paraissent des mains lépreuses, les troncs en or balançaient, pendules, mesuraient notre temps. Les femmes enceintes, encore amassées, membres tordus, et les ventres, dressés vers le ciel sans un rayon d'espoir, offrant leur douleur. Les femmes enceintes, premières victimes, et leurs gosses, asphyxiés dans la prison de l'innocence. La grande secte des corps. La procréation est le cordon coloré de Dieu, le prétexte à l'éternité.
Ma mère avait fini par se relever. Je boutonnai mon pantalon et courus dehors.
J'étais dans la cave et l’absinthe faisait son effet, enlevait aux choses les odeurs de la vie. Dans la cour pavée située sur la falaise, je lorgnai les pièces noires avec circonspection. La douleur brunit les visages, et fait prendre à l’être tout entier l’allure du spasme.
Les parois sont touchées : de chaque côté, cela suinte en abondance, cela hurle, cela soulève, cela court vers nulle part. Les visages ont couru à travers toutes les plaines, et jamais une lumière.
En demi-mots, en foudroiements, en émissions alternatives, saccadées, et finalement en râles, épouvantables et longs, comme séparés de tout autre bruit — chairs frontières et l’absence d’un écho.
Les murs, comme des habitants, rampaient, soulevaient les tapis de leurs doigts velus, humides, et faisaient des ombres sur eux-mêmes. Les pleurs étaient tout seuls et habitaient les bruits. Bientôt, l'heure s'avança, et la lune, adjacente aux toits, souffla de doux rires aux reins de la montagne. L'enfant, avec sa coupe au bol, et la crasse aux fossettes de ses joues, est tout seul dans la cave, sous le sol. Une lumière macabre éclairait les murs de terre, et le ciel avait des reflets oranges par la lucarne, ouverte aussi aux vents et à ses cris. Le cri, lui, était bien plus éloquent que toute terreur, et encore bien plus éloquent que moi qui relate la nuit des derniers flancs du monde, qui reforme les chagrins de l'absinthe, cette gondole.
Il y a un seul point sensible : c’est la membrane autour de l’angoisse, avec ses rêves pâles et ses chaleurs d’argile.
Je voulais aller voir maman un peu, elle voulait bien que je dorme avec elle cette nuit, mais elle me dit tiens mon chéri ça n'est pas un peu malsain ça hein ? à ton âge tout de même, mais elle m'invita quand même à venir, elle était toute nue sous les draps, quelque chose puait, je ne sais pas, j'adorais cette puanteur, elle me dit de me rapprocher d'elle, je le fis, j'étais bien là sous son aisselle, elle me caressait un peu les côtes, ça me chatouillait, je lui dis d'arrêter et elle continua en rigolant à son tour, nous rigolions, elle me serra les fesses avec sa force de femme, elle riait toujours, puis je ne sais pas, je m'approchai de sa poitrine en me laissant envahir un peu plus par les draps, je me camouflai là-dessous comme on se camoufle derrière la peur, je me glissai là tout bas dans le berceau grisé de la sur-protection, je m'approchai de sa poitrine, je jouai au petit chat égorgé d'avant les jours, ma mère me dit si tu redevenais bébé, hein, et que tu me tétais un peu ?, alors je me frottai contre sa peau incendiée, j'étais amoureux, je pris le bout de son sein droit entre mes dents... puis ma mère continua à rire et c'est sa main qui glissa jusqu'à mon sexe, je voulus crier mais je ne pouvais pas, j'entendais mon père se masturber sur le canapé, le chien aboyer et broyer la viande sanguinolente, la télé bourdonner, puis les murs de la maison se resserrèrent, les étoiles s'y déposèrent, une par une, décollées du ciel comme on vomit l'amour.
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Oui. Rien d'autre à dire, sauf ceci :
"le ciel avait des reflets orange (et non "oranges", les noms communs employés comme adjectifs de couleur restent invariables, sauf, à ma connaissance, fauve, rose, écarlate, mauve, indigo, pourpre) par la lucarne"
"le ciel avait des reflets orange (et non "oranges", les noms communs employés comme adjectifs de couleur restent invariables, sauf, à ma connaissance, fauve, rose, écarlate, mauve, indigo, pourpre) par la lucarne"
Procuste- Nombre de messages : 482
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Localisation : œ Œ ç Ç à À é É è È æ Æ ù Ù â  ê Ê î Î ô Ô û Û ä Ä ë Ë ï Ï ö Ö ü Ü – —
Date d'inscription : 16/10/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Je fais du Houellebecq.
Le type enfourne ma pizza. Je me demande quelle température il fait la dedans. Afin de combler le probable gâchis de temps occasionné par la cuisson, je sors griller une cigarette. Dehors traine quatre chaises. Les premières sont occupés par un couple, la troisième porte leur affaires et la dernière est trempée. J'ai envie de m'assoir. Avec insistance je regarde suffisamment la chaise mouillée pour qu'ils daignent à ôter leur babioles. De toute façon, je n'avais pas envie de parler. Ça marche. Sans doute une extension du domaine de la pute. Je ris et je suis complètement con.
Le type enfourne ma pizza. Je me demande quelle température il fait la dedans. Afin de combler le probable gâchis de temps occasionné par la cuisson, je sors griller une cigarette. Dehors traine quatre chaises. Les premières sont occupés par un couple, la troisième porte leur affaires et la dernière est trempée. J'ai envie de m'assoir. Avec insistance je regarde suffisamment la chaise mouillée pour qu'ils daignent à ôter leur babioles. De toute façon, je n'avais pas envie de parler. Ça marche. Sans doute une extension du domaine de la pute. Je ris et je suis complètement con.
Nechez- Nombre de messages : 318
Age : 35
Date d'inscription : 19/12/2007
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Nechez a écrit:Je fais du Houellebecq.
Le type enfourne ma pizza. Je me demande quelle température il fait la dedans. Afin de combler le probable gâchis de temps occasionné par la cuisson, je sors griller une cigarette. Dehors traine quatre chaises. Les premières sont occupés par un couple, la troisième porte leur affaires et la dernière est trempée. J'ai envie de m'assoir. Avec insistance je regarde suffisamment la chaise mouillée pour qu'ils daignent à ôter leur babioles. De toute façon, je n'avais pas envie de parler. Ça marche. Sans doute une extension du domaine de la pute. Je ris et je suis complètement con.
La deuxième partie de ta dernière phrase me semble correcte.
Kilis- Nombre de messages : 6085
Age : 78
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Je somnolais sur la paume d'une bonne géante dont le sourire planait loin au-dessus de moi telle une lune bénigne.
Elle avait la bouille aplatie, brune, aux traits négroïdes. Ses grosses lèvres étirées découvraient tout juste des dents saines.
Sa peau contre ma peau nue cédait tièdement, et nos sueurs mêlées marquaient les lignes de sa main ; cela aurait pu servir à une chiromancienne, si ma bienfaitrice en avait eu besoin.
Le soleil a commencé à taper plus fort, j'ai vagi. L'autre main est venue me protéger de son ombre.
Elle aussi, la nourrice, réagissait à la chaleur : sa sueur coulait, s'évaporait en une nuée à l'odeur forte, piquante. Bientôt les volutes voilèrent les rayons jaunes, et le soleil s'est transformé en petite lune insignifiante.
Chaque gouttelette s'accroche à un poil, reste ronde ou au contraire se confond avec mon corps qu'elle fait luire.
Perdue au sein d'une perle molle, l'air coule dans ma gorge, me rafraîchit et m'abreuve. Je repose dans un univers gris, doux, nacré, et dors, dors encore.
Elle avait la bouille aplatie, brune, aux traits négroïdes. Ses grosses lèvres étirées découvraient tout juste des dents saines.
Sa peau contre ma peau nue cédait tièdement, et nos sueurs mêlées marquaient les lignes de sa main ; cela aurait pu servir à une chiromancienne, si ma bienfaitrice en avait eu besoin.
Le soleil a commencé à taper plus fort, j'ai vagi. L'autre main est venue me protéger de son ombre.
Elle aussi, la nourrice, réagissait à la chaleur : sa sueur coulait, s'évaporait en une nuée à l'odeur forte, piquante. Bientôt les volutes voilèrent les rayons jaunes, et le soleil s'est transformé en petite lune insignifiante.
Chaque gouttelette s'accroche à un poil, reste ronde ou au contraire se confond avec mon corps qu'elle fait luire.
Perdue au sein d'une perle molle, l'air coule dans ma gorge, me rafraîchit et m'abreuve. Je repose dans un univers gris, doux, nacré, et dors, dors encore.
Procuste- Nombre de messages : 482
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Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
… dans mon dernier mail je crains de n’avoir pas tout dit…
Ça m’a réveillé.
Une surface blanche et métallique se déroulait jusqu’au plafond incurvé, un peu moins blanc, carrelé.
A la fin de mon abdomen, un rouge douloureux git jus, d’sus l’écusson d’un visage puis la Seine et les lettres la RETAP.
J’ai un drôle de gout dans la bouche.
Les pompiers se sont montrés volontaires, il y en a même un, fumeur, qui m’a allumé « … la dernière… » en pleurant.
Je crapote vraiment.
Le mec qui m'a poussé la femme évanouie
La cendre tremblote...
... ton psy a déplacé le rdv...
Ça m’a réveillé.
Une surface blanche et métallique se déroulait jusqu’au plafond incurvé, un peu moins blanc, carrelé.
A la fin de mon abdomen, un rouge douloureux git jus, d’sus l’écusson d’un visage puis la Seine et les lettres la RETAP.
J’ai un drôle de gout dans la bouche.
Les pompiers se sont montrés volontaires, il y en a même un, fumeur, qui m’a allumé « … la dernière… » en pleurant.
Je crapote vraiment.
Le mec qui m'a poussé la femme évanouie
La cendre tremblote...
... ton psy a déplacé le rdv...
Krebs- Nombre de messages : 22
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Date d'inscription : 12/11/2010
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Je ne comprends pas trop pourquoi ces fragments là sont dans les conversations et ceux de la poésie dans la chapitre poésie.
Je ne sais pas alors vraiment si je pose mes petites choses où il faut.
Bonne fin d'après-midi.
Je ne sais pas alors vraiment si je pose mes petites choses où il faut.
Bonne fin d'après-midi.
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
éclaircie a écrit:Je ne comprends pas trop pourquoi ces fragments là sont dans les conversations et ceux de la poésie dans la chapitre poésie.
Je ne sais pas alors vraiment si je pose mes petites choses où il faut.
Bonne fin d'après-midi.
Si c'est un texte complet c'est sur le forum, c'est un fragment, c'est ici.
Si c'est un texte court qu'on ne juge pas assez important pour prendre un fil c'est ici.
Loupbleu- Nombre de messages : 5838
Age : 52
Localisation : loupbleu@vosecrits.com
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Je vais pinailler , désolée.
Ce que je ne comprends pas, c'est que les fragments de prose sont dans le chapitre conversation,
alors que les fragments de poésie sont dans le chapitre poésie.
Ne serait-il pas plus logique que tous les fragments soient en conversation, ou dans leurs chapitres respectifs.
pour me faire pardonner mon insistance, je contribue au fragment de ce matin.
~~~~~~~
La veillée
Ce mot qui fait rêver, évoquant la chaleur, le coin de l’âtre au cœur du froid de saison. Le giron de nos mères que tous avons quitté, parfois assez amers.
Ce terme qui dans les bouches de nos pères, illuminent encore leurs yeux, pour peu qu’ils en aient connu, des veillées… Des veillées, éveillés et ensommeillés comme dans un rêve, jamais le même, que l’on partage avec celui qui est là, à portée de main ou d’oreiller et qui devient plus beau et coloré.
C’est une Matrone qui préside à la cérémonie, levée tôt matin, cuisinant toute la journée, s’occupant des bêtes et des hommes, pour les nourrir et les choyer, et des enfants aussi. Ces mômes parfois braillards, hirsutes, toujours courants, manquant renverser la pile d’assiettes ou la pâtée des poules, parfois celle du cochon, encore brûlante au bord de l’escalier. Cette femme qui le soir, parfois un dernier ouvrage sur les genoux, raconte, raconte, la vie! Oh, pas de grandes Histoires, non, des petites, celles d’ici ou là, que lui ont raconté ses parents.
Vaincue par la fatigue (les femmes sont fragiles, diront les hommes), elle laisse la parole à Son homme. Il en vient alors les histoires terribles, de guerre, de chasse, de monstres divers…etc.
J’ai connu, un peu, certaines veillées. Récemment, on a remis au goût du jour, les « mondailles » (sortir les cerneaux de noix de leurs coquilles pour faire l’huile du même nom), en hiver.
Et bigre que c’était bon…
Ce que je ne comprends pas, c'est que les fragments de prose sont dans le chapitre conversation,
alors que les fragments de poésie sont dans le chapitre poésie.
Ne serait-il pas plus logique que tous les fragments soient en conversation, ou dans leurs chapitres respectifs.
pour me faire pardonner mon insistance, je contribue au fragment de ce matin.
~~~~~~~
La veillée
Ce mot qui fait rêver, évoquant la chaleur, le coin de l’âtre au cœur du froid de saison. Le giron de nos mères que tous avons quitté, parfois assez amers.
Ce terme qui dans les bouches de nos pères, illuminent encore leurs yeux, pour peu qu’ils en aient connu, des veillées… Des veillées, éveillés et ensommeillés comme dans un rêve, jamais le même, que l’on partage avec celui qui est là, à portée de main ou d’oreiller et qui devient plus beau et coloré.
C’est une Matrone qui préside à la cérémonie, levée tôt matin, cuisinant toute la journée, s’occupant des bêtes et des hommes, pour les nourrir et les choyer, et des enfants aussi. Ces mômes parfois braillards, hirsutes, toujours courants, manquant renverser la pile d’assiettes ou la pâtée des poules, parfois celle du cochon, encore brûlante au bord de l’escalier. Cette femme qui le soir, parfois un dernier ouvrage sur les genoux, raconte, raconte, la vie! Oh, pas de grandes Histoires, non, des petites, celles d’ici ou là, que lui ont raconté ses parents.
Vaincue par la fatigue (les femmes sont fragiles, diront les hommes), elle laisse la parole à Son homme. Il en vient alors les histoires terribles, de guerre, de chasse, de monstres divers…etc.
J’ai connu, un peu, certaines veillées. Récemment, on a remis au goût du jour, les « mondailles » (sortir les cerneaux de noix de leurs coquilles pour faire l’huile du même nom), en hiver.
Et bigre que c’était bon…
Invité- Invité
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
Engourdissement
Des moutons bruns broutent les restes du soleil.
À l’éclate-cœur, s’en donnent à cœur joie.
La lumière est tombée, c’était mardi dernier.
Un mardi de soixante-et-onze, où avoir vingt-sept ans ne permettait pas de vivre.
Un vieil homme mâchouille un brin d’herbe, assis sur des débris informes, restes d’un édifice en pierre qui a chuté comme un héroïnomane, à la nitro.
Pas grand-chose de vert autour, de la terre molle, vide, poussiéreuse.
À peine de quoi rassasier les moutons, qui prennent la seule chose qui leur reste.
Après ils n’auront plus faim.
Après ils n’auront plus rien.
Tant pis, quitte à choisir, choisir pour soi, quand il y aura du manque on trompera l’ennui dans les orgies, et puis faut perpétuer l’espèce. Il n’y aura plus rien, mais on survivra quand même, les petits agneaux inventeront l’herbe. On leur apprendra à s’enfermer dans leurs rêves, à n’exister qu’au travers de l’illusion. On dira à leur corps que la faim n’existe pas, alors ils n’auront pas faim. On dira à leur tête qu’on peut être heureux sans soleil, et ils seront heureux.
On ne leur dira pas, que s’ils s’endorment trop vite, ils risquent d’oublier de recréer la vie. On ne leur dira pas, que s’ils s’endorment trop vite, personne d’autre ne viendra les réveiller, quand il n’y aura plus personne pour tenir la chandelle du peuple mouton.
Quand il n’y aura ni herbe, ni lumière, ni chaleur.
Les moutons continuent de brouter, sans se rendre compte que la veille il leur restait encore un peu de blanc, avant que l’obscurité ne les saisisse comme un aigle impitoyable, et surtout amusé par l’apparence de naïveté, la presque innocence du mouton qui laisse le rapace caresser sa laine comme le ferait le berger.
Mais le berger n’est plus là. Il est mort quand le soleil est tombé, car il savait, lui, que la nuit éternelle signifiait l’engourdissement. Une incessante rêverie, un vol de nuages en nuages, de pluie à pollution, sans espoir de retour.
Un mouton éructe, cherche un morceau de fromage pour terminer son repas. Il en trouve un, l’avale en une bouchée. Il ne se souvient pas que c’était celui de sa mère.
Des moutons bruns broutent les restes du soleil.
À l’éclate-cœur, s’en donnent à cœur joie.
La lumière est tombée, c’était mardi dernier.
Un mardi de soixante-et-onze, où avoir vingt-sept ans ne permettait pas de vivre.
Un vieil homme mâchouille un brin d’herbe, assis sur des débris informes, restes d’un édifice en pierre qui a chuté comme un héroïnomane, à la nitro.
Pas grand-chose de vert autour, de la terre molle, vide, poussiéreuse.
À peine de quoi rassasier les moutons, qui prennent la seule chose qui leur reste.
Après ils n’auront plus faim.
Après ils n’auront plus rien.
Tant pis, quitte à choisir, choisir pour soi, quand il y aura du manque on trompera l’ennui dans les orgies, et puis faut perpétuer l’espèce. Il n’y aura plus rien, mais on survivra quand même, les petits agneaux inventeront l’herbe. On leur apprendra à s’enfermer dans leurs rêves, à n’exister qu’au travers de l’illusion. On dira à leur corps que la faim n’existe pas, alors ils n’auront pas faim. On dira à leur tête qu’on peut être heureux sans soleil, et ils seront heureux.
On ne leur dira pas, que s’ils s’endorment trop vite, ils risquent d’oublier de recréer la vie. On ne leur dira pas, que s’ils s’endorment trop vite, personne d’autre ne viendra les réveiller, quand il n’y aura plus personne pour tenir la chandelle du peuple mouton.
Quand il n’y aura ni herbe, ni lumière, ni chaleur.
Les moutons continuent de brouter, sans se rendre compte que la veille il leur restait encore un peu de blanc, avant que l’obscurité ne les saisisse comme un aigle impitoyable, et surtout amusé par l’apparence de naïveté, la presque innocence du mouton qui laisse le rapace caresser sa laine comme le ferait le berger.
Mais le berger n’est plus là. Il est mort quand le soleil est tombé, car il savait, lui, que la nuit éternelle signifiait l’engourdissement. Une incessante rêverie, un vol de nuages en nuages, de pluie à pollution, sans espoir de retour.
Un mouton éructe, cherche un morceau de fromage pour terminer son repas. Il en trouve un, l’avale en une bouchée. Il ne se souvient pas que c’était celui de sa mère.
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 34
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: FRAGMENTS : Le fil de vos textes courts
D'accord pour les " moutons qui broutent les restes du soleil " cela me change des autres...
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
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