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midnightrambler
Joseph
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Message  Joseph Mer 2 Mar 2011 - 13:35

Bonjour à tous, voici la première partie d'un tryptique "Métro/Boulot/Dodo", à bientôt :


La tuyauterie dilatée claque au rythme d’un métronome. Clac. J’ouvre les yeux et les ténèbres peinturent mon champ visuel. Clac. De son rouge incandescent, l’horloge numérique du réveil indique qu’il est une minute moins la première sonnerie. Clac. Monomaniaque, je suis suspendu au temps et appréhende l’heure prévue. Clac. J’anticipe et refuse que cette machine m’arrache de mes précieuses rêveries capitonnées. Clac.

Une fois levé, je ne laisse pas le temps à mon organisme de se mettre en route. Les pieds moulés dans des sabots en cuir, les hanches congestionnées par une ceinture auquel il manque un trou, ma tête bourdonne insidieusement. Le nœud de cravate est trop serré et ma circulation capricieuse me le fait savoir. Ce que je sais, c’est que costumé de telle sorte, je suis fin prêt pour un tour.

Dehors, les rues sont endormies et les voitures paraissent faire moins de bruit qu’en journée, en lévitation au dessus du goudron froid. Les branches s’agitent, un concert de piaillements annonce l’aube. Car la nuit est présente mais son crépuscule est proche. A feu doux, comme un crépitement diurne précédent l’ébullition future de la ville. Sa cohorte de voyageurs pressés et de cafetiers bourrus. L’agitation qui sommeille agit tel un catalyseur à mon éveil au monde.

Les gens s’alignent sur le quai, affluent par petite touche, quelque part, un soliste joue une composition divine avec les destins de chacun. Tout est silencieux et la méfiance prévaut. C’est la guerre froide et il caille dans les alentours. On s’observe mais sans croiser le regard de l’autre, comme si il était encore trop tôt pour lire dans les yeux d’un inconnu. La partition déchante à l’arrivée soudaine d’un gueulard en haillons dont la teinte terreuse et les lambeaux s’agitant dans l’air lui donne l’allure d’un rescapé de l’apocalypse. Muni d’une sombre bouteille en verre qu’il remue au milieu des têtes indifférentes, sa voix rauque résonne dans la station et paraît s’échapper des entrailles d’une créature imaginaire. Il s’approche de moi et je crains de ne pouvoir l’ignorer, de devoir me pousser, tourner le visage ou exprimer une gêne. J’étais si tranquille jusque là, le trajet se passait bien. Heureusement, l’arrivée du train me sauve des affres d’une humiliation probable, et l’homme, titubant, se crochète la jambe et bascule soudainement sur les rails. Les craquements osseux sont étouffés par les frottements métalliques des roues. Les portes s’ouvrent et invitent la foule au purgatoire.

Tandis que la rame gémit et que la voiture tangue dans la houle sous-terraine, j’observe les corps serrés se mouvoir comme l’herbe au gré du vent. La promiscuité nous rapproche, à présent liés, les regards se font plus francs. Les odeurs s’entremêlent, fraîches : ce sont la laine chaude et le cuir chevelu shampouiné qui se mélangent au parfum délicat d’une fleur indéterminée, mais voilà que l’âcreté d’une haleine inconnue s’y mêle. Bel-Air, le wagon libère le flot sur le quai tel des cellules disciplinés se répandant dans l’atmosphère. Les portes automatiques se ferment. Sur les banquettes à l’avant du véhicule, un jeune collégien inquiet essuie les foudres d’un groupe de cruels hilares. Un des leurs, le chef, lui saisit la tête par les deux oreilles au niveau de sa taille et simule une fellation. Affairé, Le bourreau se tourne vers moi et sourit. Je lui adresse un clin d’œil. C’est le moment qu’il choisit pour sortir de son jean une longue lame qu’il plonge dans la trachée de sa victime, éclaboussant l’assemblée de jets de sang noirci. Et s’applique ensuite à découper les nerfs et dernières vertèbres soutenant le corps. Puis le groupe engage une partie de jongles avec ce qu’il reste du collégien. Ils m’y invitent mais le défilement des méandres obscurs ralentit. Terminus.


Joseph

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Message  midnightrambler Mer 2 Mar 2011 - 15:25

Bonjour,

Le lecteur n'aime pas toujours se remettre en cause ... cette écriture désarticulée peut le mettre mal à l'aise.
Une très jolie formule : "un soliste joue une composition divine avec les destins de chacun."
Quant au fond, c'est un peu too much pour moi !

Amicalement,
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Message  Invité Mer 2 Mar 2011 - 20:31

J'ai du mal à comprendre pourquoi je n'accroche pas... ce n'est pas le too much évoqué par Midnight puisque bien avant cet horrifique épisode je me demandais si j'allais continuer. Ce n'est pas le style, que je trouve plutôt bien... Désolée, je suis incapable de justifier et j'attends ta prochaine production pour voir si c'est moi ou quoi ...

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Message  elea Mer 2 Mar 2011 - 22:30

J’aime l’écriture qui comporte de belles images et sait créer une ambiance, particulière mais prenante.
Mais alors je n’ai pas bien compris le fond du texte.
Si ce premier extrait du triptyque s’arrête là, je ne comprends pas bien l’intérêt. Tout ça pour une scène de violence gratuite ? J’ai l’impression que quelque chose m’échappe, que ce texte veut dire quelque chose que je n’ai pas saisi, ce qui est assez frustrant.
Peut-être que tout s’éclairera avec "boulot et dodo". Que j'ai bien évidemment très envie de lire.

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Message  Invité Jeu 3 Mar 2011 - 8:16

Beaucoup de soin apporté à ce premier texte. J'attends la suite pour me prononcer.

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Message  Lizzie Jeu 3 Mar 2011 - 8:56

On sent le travail dans la mise en scène. Justement, je crois que j'ai trop senti l'artificiel, les ficelles, pour adhérer, car le ton, l'intention, sont froides. Et j'ai trouvé les scènes de violence trop "convenues", présentes pour choquer, sans autre but. Donc je n'ai pas adhéré, mais je vous lirai avec curiosité sur un autre texte.

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Message  hi wen Jeu 3 Mar 2011 - 20:21

il y a un monde interne ronronnant qui coule bien, on sent que le personnage prend du plaisir à s'enferrer dans un monde clos rassurant,
reste à savoir si c'est partageable pour le lecteur.

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Message  Invité Jeu 3 Mar 2011 - 20:57

J'ai trouvé le style très intéressant, et puis ce basculement vers la violence, j'avoue que je n'ai pas bien saisi. Pourquoi ? Pour évoquer la violence qui se cache dans la foule anonyme, et qui est prête à s'allumer à la moindre occasion, au moment le moins attendu ? Si c'est le cas, d'accord, mais il fallait préparer le terrain avant, ici ça tombe comme les cheveux sur la soupe, et c'est dommage, je trouve.

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Message  Joseph Jeu 3 Mar 2011 - 21:17

Bonsoir à tous et merci pour les commentaires.

Le basculement dans l'horreur, c'est parce que je cherchais à étayer un peu le côté métaphorique du récit (oui, pour moi, grand oisif de nature, se rendre au boulot d'un et en transport de deux, c'est un enfer! :-)).

Le clochard qui tombe, c'est certainement l'imagination du narrateur qui préfère ça plutôt que d'avoir à le croiser. L'agression vient peut être d'un rêve qu'il fait sur la banquette et qui lui rappelle un traumatisme de jeunesse.

Ou peut être qu'il est vraiment au purgatoire...(j'ai pensé à l'échelle de Jacob, excellent film, pour le texte)

A bientôt pour la deuxième partie et bonne soirée à vous.




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Message  Jano Sam 5 Mar 2011 - 18:48

Quel dommage cette scène de violence gratuite à la fin ! Je m'étais laissé emporter par cet univers urbain qui ne m'est pas coutumier, courant moi aussi comme un automate dans les couloirs du métro, enjambant sans sourciller la misère humaine avachie d'alcool, petit être noyé dans la masse et puis, et puis patatras ... du gore, inutile, pas crédible, pourquoi ?
Tu devrais reprendre ce final qui n'apporte rien à ton histoire. Tout le reste est vraiment bien.
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Message  Joseph Mar 8 Mar 2011 - 11:02

Bonjour à tous, voici le deuxième volet : "boulot".

Il est de ces petits plaisirs futiles qui amènent l’homme à oublier un instant ses préoccupations économiques et le plongent dans un état de satisfaction momentané. Le rituel du café est aussi un élément de rapprochement social où les sujets météorologiques se mêlent aux projets estivaux. Jamais une telle attention n’avait été portée aux programmes télévisuels abrutissants. Parfois, la politique s’immisce, les débats s’enveniment ou s’accordent, et les profondes convictions, les plus intimes, enfouies sous des monticules trompeurs, de chacun s’expriment avec une ardeur éphémère.

Le soufflet retombe, il est l’heure d’assurer son confort : loyer, mets savoureux, plage brûlante, véhicule à peinture métallisée, veste cintrée, conquêtes. L’exhaustivité de l’ensemble sera fonction du statut social ou de la mansuétude bancaire. On est « corporate » ou simplement aliéné par les conventions, en attendant, sur un air de vipère, c’est la cadre que personne n’encadre qui ouvre les hostilités à base d’oubli de formules de politesses et autres bassesses électroniques. La hiérarchie en copie de son « mail » prendra connaissance de mes supposées fautes à la vitesse de la lumière. Qui lui manque, un éclair de génie se répand sur mes doigts et lui adresse une réponse cinglante. Fin du premier acte.

Le café dilue ces quelques contrariétés, juste à temps pour affronter ce gros bonhomme carriériste de 60 balais. Il lui en a manqué pour balayer devant son étable, car de foin, parlons en, lorsque le vilain s’acoquine de cette hiérarchie, décidément, et reporte ses faiblesses sur un autre que lui, moi aujourd’hui. Sa bonté déborde, le vieux con vivant sa médiocrité par procuration.

Dans ce bourbier, les alliés sont rares. Opportunistes, Il arrive qu’ils sommeillent et ne se révèlent qu’en cas de désagréments communs. Si discrètes jusqu’alors, les relations s’épaississent, et sous l’impulsion néfaste de forces cabalistiques, les esprits de revanche se mettent en branle, les revendications communes, frondeuses s’unissent pour contrecarrer les sombres desseins des gens pressés. Moteur d’une vie programmée, le passage à l’échelon supérieur motive leur existence comme Jacob gravissant son échelle. A l’heure moderne, ils affichent ostensiblement leurs signes d’appartenance à la secte des justes. Le juste prix à payer pour vendre son âme au chef qui me convoque après repas.

La suite n’est que péripéties et rocambolesques aventures. Enhardi par un stade crépitant, mon pied fouette parfaitement le ballon qui vient se loger dans la lucarne adverse. L’araignée tissant sa toile à l’angle des cages me dit merci et la foule se lève, exulte, gronde comme le sillon fumant de ses avions de mauvaises augures. Pris entre deux feux, le bombardement est proche, et muni de mon objectif dernier cri, j’offre des instantanés spectaculaires qui écarquilleront les yeux des observateurs vaguement inquiets sur leur territoire prospère. Où les festivals en tout genre se tiennent, et sur le tapis rouge, j’ai l’impression d’être le centre du monde. A peine le temps de sourire à la populace et ses flashs incessants qu’une fusée m’attend pour m’emmener là haut, loin à travers la matière et ses barrières physiques.

Un carton sur les bras, je prends un nouvel envol. Traversant les rangées de bureaux où s’affairent mes anciens collègues, j’ai l’impression d’être en apesanteur, comme au dessus des autres. D’ailleurs, ils ne me voient même pas.

Joseph

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Message  elea Mar 8 Mar 2011 - 19:12

Pas trop aimé ce boulot en première lecture, j‘ai eu beaucoup de mal à comprendre où le texte voulait en venir et je n‘arrivais pas à vraiment entrer dedans.
Peut-être à cause de la forme, non pas que ce soit mal écrit, mais certaines phrases ne se comprennent pas sans effort, enfin du moins pour moi.
Ici par exemple : La hiérarchie en copie de son « mail » prendra connaissance de mes supposées fautes à la vitesse de la lumière. Qui lui manque, un éclair de génie se répand sur mes doigts et lui adresse une réponse cinglante
A vrai dire, je ne sais pas si c’est parce que je n’étais pas dedans mais je n’ai compris certains passages qu’à la lumière du dernier paragraphe (le relevé de fautes de la cadre par exemple ou les alliés opportunistes).
D’ailleurs, sous cet éclairage j’ai plus apprécié ma seconde lecture.

elea

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Message  Invité Mer 9 Mar 2011 - 15:45

Et revoilà Jacob's ladder, décidément ça t'inspire. J'ai plutôt apprécié cette évocation du monde du travail, et la façon d'y faire face, la réaction du narrateur. Dommage que cela prenne du temps à se mettre en place, il me semble qu'on pourrait réduire les 4 paragraphes d'introduction de moitié. Ou alors qu'on aurait intérêt à mieux définir les personnages avec leurs mesquineries et autres rêves à deux balles.

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