FRAGMENTS : le fil de vos textes courts

"- les faits, parlez moi des faits
- pour que je sois aussi seul, tout le monde m'a enfermé là"

Notre monde n'est déjà plus


Et c'est pour cette lumière que je vins au théâtre, un jour pluvieux, où pleuraient les morts dans leurs tombes encore vertes ; où semblaient s'offrir au ciel, les fleurs et le miel.

Dos crawlé

Nageuse tranquille dans la lumière
Octobre sème des particules suspendues
Hors temps.
Une mouette pose nue dans le soleil
Taire à terre
Passe devant le silence de l’instant
Sous le nuage paresseux le voyage
Paisible du passant dont je suis étendue
Le bagage posé.

La mer est immense
et un plumeau sous le bras
une nouvelle maladie
nous serons las

Tout est calme

Un jour vous me hanterez d'un revers de la main
j'accepte
j'ai dit
je n'ai rien dit de plus qu'un hochement de paupière

On s’allonge

Je sais ce que tu vois en moi
les petites failles savantes comme des veines et les grands yeux tristes

Les avionneurs

Les avionneurs retirent leur casquette quand une dame passe
Certaines vous le diront

Par temps clair, il arrive que l’un d’eux s’assoie sur une aile et mange son sandwich
En regardant le vague

Mais le plus clair du temps,
Mains sur les hanches, clé à molette à portée,
Ils mirent les turbines

Elle a longtemps volée celle-là, pas vrai avant d’atterrir ici ?


Il y a ce truc à redresser

carte postale

écrire
d'un trait barrer

posez le sur la langue

5 chiffres et l'affaire est pliée

Un poisson
Un poisson rouge
Rouge, rouge
Perd perpétuellement la boule
Un poisson à mémoire courte
A mémoire
Courte
La distance
La distance entre le nénuphar
Et la petite grotte sous-marine
Qui fait des bulles
Des bulles courtes
La distance
Des bulles
Courte
La distance
Des bulles qui pètent à la surface de l’eau
Pètent perpétuellement à la surface
Eclatent
Rouge
Et éclate le poisson à mémoire courte
Poisson fêlé du bocal
Tourne, tourne, tourne
Un poisson
Un poisson rouge
Au matin
Au matin clair
L’eau fraîche y coule
Au matin
Matin qui coule
Monotone
Jour après jour
Tout après tour
Quand le bocal et le poisson
Fêlé
Qui perd la boule
Rouge, rouge, qui perd
Et qui tourne
Qui perd
Tourne
Et qui
Rouge
Tourne
Tourne
A l’infini

Remplir la pièce


Le soleil a grandi

Les abeilles butinent

Tout ce qui tombe, brûle et flambe


Je me souviens ta main sur la mienne

Chako Noir a écrit:Un poisson
Un poisson rouge
Rouge, rouge
Perd perpétuellement la boule
Un poisson à mémoire courte
A mémoire
Courte
La distance
La distance entre le nénuphar
Et la petite grotte sous-marine
Qui fait des bulles
Des bulles courtes
La distance
Des bulles
Courte
La distance
Des bulles qui pètent à la surface de l’eau
Pètent perpétuellement à la surface
Eclatent
Rouge
Et éclate le poisson à mémoire courte
Poisson fêlé du bocal
Tourne, tourne, tourne
Un poisson
Un poisson rouge
Au matin
Au matin clair
L’eau fraîche y coule
Au matin
Matin qui coule
Monotone
Jour après jour
Tout après tour
Quand le bocal et le poisson
Fêlé
Qui perd la boule
Rouge, rouge, qui perd
Et qui tourne
Qui perd
Tourne
Et qui
Rouge
Tourne
Tourne
A l’infini

J'aime beaucoup ce petit texte, Chako, les reprises de mots donnent vraiment une impression de tourner en rond, et pourtant rien de monotone, c'est super bien fait ! On peut commencer à n'importe quel moment et repartir au début, observer, tourner encore, j'adore !

Et j'ai bien ri ici :

Des bulles qui pètent à la surface de l’eau
Pètent perpétuellement à la surface

je sais pas, j'ai vu les bulles, encore des bulles, toujours ces bulles qui remontent...

La page se pose,
Sur un papier rugueux,
Corne d’histoire et,
Ose,
Couper la ramure,
D’une page, d’une fin.
Au regard, au souffle de,
Mes traits opportuns :
S’étire le maigre sourire,
Déçu,
Du lecteur de la fin.

L'alphabet des agences de notation

D clowns noteurs dirigent le monde
A coups de triques alphabétiques
B c'est encore la note triple
D couper la main apathique
E s'en fichent bien c'est immonde
F fait garanti sur facture
G mal au cœur j'ai mal aux tripes
H chez moi c'est la solution
I radiez-moi de votre liste
D clowns noteurs dirigent le monde
A coups de triques alphabétiques

Et le cri de la laitue qu'on coupe, l'avez-vous entendu, ce cri, non bien sûr... pour vivre à la campagne, je peux vous dire que je ne mange pas de légumes ni de fruits, ou très peu, trop horrible... et quand je marche, je fais bien attention où je pose mes pieds. La moindre petite fleur, le plus petit brin d'herbe pliés sous mes pas me mets dans un état que vous ne pouvez imaginer... j'ai refusé un pique-nique familial sur le grand pré près du lac ; tout le monde m'a pris pour une folle ! vous rendez-vous compte ?! pour une folle !
On ne pense jamais assez à tout cette vie qui bat autour de nous...

Janis: ça peut expliquer des tas de choses... :-)))

c'est vraiment un nid à petits trésors ce fil!

Chako, c'est exactement ce qui s'est révélé à moi pendant que j'écrivais ce fragment.

Car :

les mots savent de nous ce que nous ignorons d'eux
(rené char)

René Char rien d'autre à dire !

Janis a écrit:les mots savent de nous ce que nous ignorons d'eux
(rené char)

Joli! (et bien vrai)
Aucun rapport (et c'est pas dans le bon fil) Ba j'adore ton avatar!
Et merci Phylisse pour le commentaire :-)

Bon quand même, pondons un haïku (pour d'ici un ou deux mois)

Je veux hiberner
Car mon cœur craint le froid
Rêver de toi réchauffe

joli aussi
(les puristes te diront qu'un haïku ne doit pas être une phrase mais on s'en fout)

Juste avant qu'elle ne s'éteigne dans le lit
à 80 ans
on l'entend soudain
d'une voix de toute petite fille
appeler plusieurs fois :

maman !

qui nous crève le cœur

Hou, dans la série histoires très courtes, celle-ci est particulièrement réussie! Bravo!

Janis a écrit:
Juste avant qu'elle ne s'éteigne dans le lit
à 80 ans
on l'entend soudain
d'une voix de toute petite fille
appeler plusieurs fois :

maman !

qui nous crève le cœur

Ça m'a glacé le sang. C'est magnifique, j'ai encore du boulot.

mais non !
plus que
tagada

35 ans, allez

(non, juste pour dire que j'ai mis longtemps avant de savoir aller à l'essentiel - ce qui n'est pas obligé, mais c'est mon truc)

Janis a écrit:(non, juste pour dire que j'ai mis longtemps avant de savoir aller à l'essentiel - ce qui n'est pas obligé, mais c'est mon truc)

Ça me fait penser à Picasso, qui à la femme outrée du prix d'un croquis "fait en cinq minutes", répond :
"Non, Madame, ça m'a pris toute ma vie !"

Deux mains ne se rejoignent pas

Ton regard sur l’océan,
tu t’effondres

ce te tu tiens, s'abandonne

Nos deux mains se rejoignent pas

− Encore un trou pour vous me dit le facteur en me tendant le carton.
Ce qui m’énerve, ce n’est pas qu’il me réclame un euro trente pour insuffisance d’affranchissement, mais qu’il ait ce ton condescendant.
Quand même, je me demande comment ils s’y prennent pour affranchir les trous, ça ne pèse rien, un trou, ça prend de la place, ça d’accord − j’en ai déjà tellement que je suis obligée de les empiler, c’est tout petit chez moi.-
Nous avons des rapports un peu tendus, le facteur et moi.
Enfin, je suis content quand même de mon colis : celui-ci je ne l’attendais pas, et c’en est un beau.
Pas très grand mais beau : tout lisse, d’une belle forme ovale régulière. Je ne sais pas ce que je vais en faire, mais ça n’a pas d’importance. Un trou a toujours son utilité, on est si compact !
Il y a longtemps que je les collectionne. Collectionner n’est pas le bon mot : disons que j’en ai beaucoup.
Au début, je n’avais rien demandé, les premiers sont arrivés comme ça, sans prévenir et ça ne m’a pas vraiment fait plaisir. D’abord ils prenaient trop de place. Et puis, ça me fichait des vertiges. Tout petit, au bord d’un trou énorme, je voudrais vous y voir…
En plus, je n’avais ni le culot de les mettre en vitrine, ni l’imagination nécessaire pour les maquiller, ni le réflexe de les planquer… Mes trous en ont suscité des commentaires ! Même de la part de mes parents, qui pourtant auraient pu comprendre.
Petit à petit, je m’y suis fait, jusqu’à me lover dedans, à trouver ça sinon confortable du moins esthétique. Certains sont en couleur − ça ne facilite pas le rangement sauf à mettre de côté l’harmonie chromatique.-
Je n’ai pas fini d’explorer les plus longs, tunnels miniatures qui débouchent sur je ne peux prévoir quel versant vierge, sauvage, et dont la découverte nécessite un équipement spécial : crochets, ventouses, harnais, boucles et nœuds compliqués.
Je me souviens de la noirceur angoissante de l’un d’eux, où seule l’évocation de l’origine du monde et le rire salvateur qu’elle me procure m’ont permis de revoir le jour.
Mais en vieillissant, je n’aime plus que les trous superficiels, ceux qu’on peut aisément équiper d’un minimum de confort, quitte à leur adjoindre quelques cavités annexes. Les femmes m’ont été d’une grande utilité dans ces aménagements. Je n’ai toutefois pas réussi à conserver leur intérêt pour mes trous au-delà de quelques mois. Je pense qu’elles s’y perdaient. Moi-même, quelquefois…

Le facteur est toujours planté sur le paillasson.
Je ne lui donne jamais de pourboire.
Cet homme boit comme un trou.

- Mourir ? Mais ça va pas ? Plutôt crever !

beuglait-il en zigzagant dans le couloir.

Saisie automatique

Mon cœur,

Je t'envoie ce ma...
ce macaque,ce machin, ce magot, ce malus...
Je t'envoie ce message
pour te dire mon am...
mon amortisseur, mon ambivalence, mon amphigouri

Tes grands yeux am...
amochés, amplifiés, ampoulés...
Tes grands yeux m'ont am...
amidonné, amorti, amputé

Je voudrais tant te se...
te sécher, te sectionner, te secouer
Je voudrais tant te prendre dans mes br..
dans mes bretelles, dans mes braguettes, dans mes brancards
te se...

Pardonne-moi, mon ch...
mon chafouin, mon chameau, mon chaman, mon charlatan
Pardonne-moi mon ché..
mon chemineau, mon chenil, mon cheptel, mon chétif

Je....
Pardonne-moi....

Et merde.
@ plus

:-)))))
Cela m'arrive souvent de renoncer à envoyer un sms à cause de cette saisie automatique qui me ferait dire n'importe quoi, et que je suis incapable de supprimer.
Parfois, franchement, les mots proposés donnent un tour surréaliste au message !

Merci pour ce moment jubilatoire, Iris!

Janis, l'ex est lent . l'ex hait "taira"!

Je me souviens de la table carrée dans le petit salon
et toujours le même repas
et faire la vaisselle dans l'évier fendu
Regarder Aujourd'hui Madame au lieu d'aller au collège

et sa vieille main ridée qui me tenait, me tenait
me tient encore
ma petite grand-mère
qui m'aimait tant
dans ses robes en papier peint

« Il s’en est fallu de peu cette fois pour que je tombe »
C’est avec cette idée-là, que Gaël, 40 ans, renouant ses lacets, construisait sa nouvelle journée sur le boulevard de Peraso

Il était 20 heure.
L’heure de la débauche.
Cette heure où les bagnoles dégueulent de partout en klaxonnant

On l’avait pris en flagrant délit 48 heures plus tôt pour 600 euros de tickets resto

8 mois de sursis.

Le proc’, cet enfant de 28 ans, avait tourné vers lui son regard bleu acier

Dans le fond de ses yeux, ce grand océan ouvert sur les remous du monde, Gaël comprit alors qu’il s’en tirerait à bon compte ce coup-ci

Ça ne serait pas Nanterre

Quelque chose qui ressemble à de l’amitié
Quelque chose comme ça
tout au fond


Mais bon, il ne faut pas non plus trop en demander à un proc’

^^

Tes yeux vides, ton teint blême, tes cheveux en pagaille.
La chambre est vide, j'ai mis deux couverts à midi.
Un verre de trop, renversé, toi, tache blanche sur le sol, recroquevillée.
Les draps sentent encore nos passions d'antan.
Sueur, fatigue, mal de crâne.
Je te regarde.
Et merde.

Et quand je traînais dans les rues
la nuit treize ans
pieds nus
perdue

c'est elle qui me trouvait en de mauvaises mains
"allez viens"
et me consolait dans le lit
et ne posait pas de question
et ses vieux doigts cueillaient mes larmes

on va se faire un chocolat

Il y a des très belles choses ici (je pense par exemple aux trois derniers !)
qui en fait mériteraient un fil à elles toutes seules

pour le ouikand
voilà un petit poème d'amour

arf

et ben pisque c'est ça
je suis assis
et tu es là
en face de moi
je vois tes cheveux
et
c'est bon

La nuit je rêvais que j’étais poursuivie par un tractopelle

&

Je ne voulais pas manger les choux-de-Bruxelles